Actes n°1 / Désir de langues, subjectivité et rapports au savoir : les langues n'ont-elles pour vocation que d'être utiles ?

Apprendre et réapprendre la langue du partenaire par le tandem linguistique transfrontalier au sein d’Eucor – Le Campus européen : entre motivation professionnelle et désir personnel

Chloe Faucompré, Nina Kulovics

Résumé

Résumé

Dans une Euro-région telle que le Rhin supérieur, où la coopération transfrontalière est institutionnalisée, le travail avec l’Autre peut être chose fréquente et conduire à l’émergence de besoins spécifiques venant se heurter à des représentations et des croyances bien ancrées chez les individus. Le réseau Eucor – Le Campus européen constitue justement une plateforme collaborative transfrontalière où les membres des cinq universités allemandes, suisses et françaises partenaires sont amenés à coopérer à tous les niveaux. Toutefois, comment amener les employés (personnel administratif et enseignants-chercheurs) de ce réseau à coopérer entre eux, si ce n’est en dépassant les frontières linguistiques et culturelles ? Et plus précisément, dans quelle mesure le tandem linguistique transfrontalier constitue une méthode pertinente pour donner envie à ces employés d’apprendre ou de réapprendre la langue du partenaire ?  Pour répondre à ces questions, notre contribution propose de s’appuyer sur le discours des 16 participants de l’édition 2017-2018 à la formation linguistique et interculturelle « Communiquer dans la langue de l’Autre » proposée par NovaTris, collecté à l’aide d’entretiens semi-directifs individuels. Grâce à une analyse de contenu thématique, nous verrons en quoi le désir d’apprendre ou de réapprendre la langue du partenaire dépassait le plus souvent la simple motivation professionnelle des participants interrogés, nous révélant alors toute une série de facteurs liés au désir de rencontrer et de « faire avec » l’Autre, présentant ainsi le tandem linguistique transfrontalier comme une méthode permettant de répondre en partie aux objectifs de cohésion interrégionale du Rhin supérieur.

Chloé FAUCOMPRÉ
Pädagogische Hochschule Freiburg, Institut für Romanistik
Université de Haute-Alsace de Mulhouse, ILLE (EA 4363)

Nina KULOVICS
Université de Haute-Alsace de Mulhouse
Université de Strasbourg, Département LEA

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Introduction

La recherche que nous présentons ici se déroule dans la région transfrontalière du Rhin supérieur. Cette région bénéficie d’une coopération transfrontalière impulsée par une volonté européenne de cohésion sociale, politique et économique. Cette intégration européenne se réalise notamment à travers la conduite de projets transfrontaliers dans différents domaines (environnement, éducation, transports, etc.) comme les programmes INTERREG[1]qui contribuent à l’effacement des frontières entre les États (Gireaud, 2014 : 154). A cela s’ajoute une institutionnalisation de cette coopération transfrontalière représentée par la Conférence franco-germano-suisse du Rhin supérieur qui vient coordonner celle-ci en vue de faciliter les échanges transfrontaliers et la vie quotidienne des citoyens. 

Cette coopération s’étend au domaine universitaire avec la création du réseau Eucor – Le Campus européen regroupant cinq universités situées de part et d’autre du Rhin, afin de favoriser la mobilité transfrontalière du personnel et des étudiants, ainsi que la coopération au niveau de la recherche. C’est justement au sein de ce campus que s’est déroulée notre étude, et plus précisément dans le cadre d’une formation linguistique et interculturelle initiée par NovaTris[2]et proposée au personnel enseignant, étudiant et administratif appartenant aux universités de campus désireux d’apprendre ou de réapprendre la langue du partenaire français, suisse ou allemand. En effet, le facteur linguistique et interculturel est primordial si l’on veut amener les individus à coopérer entre eux de manière efficace. Bien que les recommandations européennes en matière de politique linguistique portent avant tout sur la compétence plurilingue, la prépondérance de l’anglais dans les échanges scientifiques (Poteaux, 2014) et administratifs est un fait. Ainsi, puisque la formation proposée ne requiert aucune obligation et que le public auquel elle s’adresse n’est pas débutant dans la langue de l’Autre, la question suivante s’est posée : Dans quelle mesure, la méthode du tandem linguistique permet de répondre de manière la plus adéquate possible aux exigences politiques en matière de coopération transfrontalière ? Et surtout, et c’est à cette question que tente de répondre notre contribution, qu’est-ce qui motive les membres d’Eucor – Le Campus européen à participer à cette formation et de quelle manière se représentent-ils l’apprentissage de la langue du partenaire dans un contexte comme celui-ci ?

Etant nous-mêmes chercheuses, mais aussi intervenantes au sein de la formation pour la partie tandem lors de l’édition 2017-2018, nous avons mené une recherche-action afin de continuer à améliorer la formation pour les éditions prochaines, jusqu’à obtenir un concept efficient. 

Pour répondre à ces interrogations, notre contribution proposera dans un premier temps de relever les spécificités de notre contexte en matière de coopération transfrontalière ainsi que les enjeux de l’apprentissage de la langue du partenaire dans une telle configuration. Dans un second moment, nous expliciterons les caractéristiques du tandem linguistique transfrontalier, afin de mettre en avant la plus-value de cette méthode pour l’apprentissage de la langue du partenaire au sein d’Eucor. Dans un troisième moment, nous nous intéresserons à tout ce qui concerne les variables pertinentes à prendre en compte dans l’apprentissage d’une langue à l’âge adulte, à savoir les représentations sociales et la motivation. Enfin, après avoir exposé et justifié notre démarche méthodologique, nous interpréterons des extraits des entretiens semi-directifs individuels menés avec les participants, afin de répondre à notre problématique.

1. Eucor –Le Campus européen : un contexte particulier

La région transfrontalière du Rhin supérieur regroupe quatre zones géographiques appartenant respectivement à la France (la région Alsace), l’Allemagne (le Sud de la région du Palatinat et le Pays de Bade) et la Suisse (le nord-ouest de la Suisse et les cantons de Bâle-Ville), qui bénéficient d’accords de coopération à différents niveaux, les plaçant ainsi en interaction permanente (Conférence franco-germano-suisse du Rhin supérieur, 2016 : 3).

Toutefois, ce contexte à priori idéal pour l’apprentissage de la langue du partenaire fait preuve de quelques constatations alarmantes en matière de bi-plurilinguisme d’une part. En effet, si ce dernier constitue un objectif phare du Rhin supérieur, auquel Eucor – Le Campus européen contribue en favorisant la mobilité et la coopération universitaire « sans frontières », les résultats d’enquêtes portant sur le programme INTERREG V indiquent que la mauvaise connaissance de la langue et de la réglementation du pays voisin constituent les obstacles à la coopération transfrontalière les plus souvent cités (INTERREG V Rhin supérieur, 2014 : 42). Selon nous, ces résultats signifient que la coopération transfrontalière est menacée, et non définitivement acquise.

1.1 Eucor – Le Campus européen : vers une interface collaborative universitaire

Eucor – Le Campus européen est un groupement tri-national franco-germano-suisse. Ses membres sont l’Université de Bâle, l’Université de Haute-Alsace (UHA), l’Université de Strasbourg (UniStra), l'Université Albert Ludwig de Fribourg-en-Brisgau, et le Karlsruher Institut für Technologie(KIT). En 2015, ces cinq universités ont créé une entité juridique prenant la forme d’un groupement européen de coopération territoriale (GECT), leur permettant de conserver pleinement leur autonomie tout en ayant la possibilité d’agir ensemble de manière plus ciblée sous le nom « Eucor – Le Campus européen ». En tant que premier GECT porté exclusivement par des universités, ce campus tri-national est un projet modèle et unique dans l’espace européen de la recherche. Il est par ailleurs en passe de devenir une université européenne[3], selon la définition entendue par le président de la République française Emmanuel Macron à l’occasion de son discours du 26 septembre 2017[4]à la Sorbonne :

Je propose la création d’universités européennes qui seront un réseau d’universités de plusieurs pays d’Europe, mettant en place un parcours où chacun de leurs étudiants étudiera à l’étranger et suivra des cours dans deux langues au moins. Des universités européennes qui seront aussi des lieux d’innovation pédagogique, de recherche d’excellence.

Aussi bien pour les étudiants que pour les chercheurs, la mobilité transfrontalière doit ainsi devenir une expérience quotidienne au sein de ce campus. À cette fin, les universités membres unissent leurs différentes compétences et ressources. Des programmes de financement tels que Seed Money[5]viennent soutenir les projets transfrontaliers innovants dans le domaine de la formation et de la recherche. Des structures sans murs ni frontières, ainsi qu’une gouvernance et une stratégie communes en matière de recherche et de formation bi- et trinationales constituent le fondement[6]de ce campus européen. Ainsi, en proposant un projet de recherche sur le développement d’une formation trinationale linguistique et interculturelle répondant aux exigences du contexte en vue de renforcer la cohésion entre les membres de ce réseau, notre étude vient tout à fait s'inscrire dans les objectifs d'Eucor – Le Campus européen.

1.2 Eucor – Le Campus européen etla langue-culture du « partenaire » 

L’utilisation dans notre contribution de l’expression « langue du partenaire » n’est pas anodine et a pour objectif de souligner le caractère politico-économique de cette coopération transfrontalière. Dans les textes relatifs au Campus européen Eucor, nous retrouvons justement très fréquemment l’utilisation du terme « partenaire » qui, selon nous, ne véhicule pas la même idée que « langue du voisin » ou « langue de l’Autre ». Si l’expression « langue du voisin » renvoie à l’idée de proximité géographique et de cohabitation (Faucompré, 2018), « langue de l’Autre » met de la distance et place donc le « voisin » dans la position de « l’étranger », renforçant alors la dichotomie nous/eux et allant à l’encontre de l’idée d’interface que souhaite véhiculer Eucor – Le Campus européen. Tandis que « langue du partenaire », en plus de l’idée de « partenaire économique », évoque également celle de l’« agir avec » supposant la poursuite d’un objectif commun. Dans cette dernière expression, la proximité géographique est totalement absente et tend de ce fait à faire disparaître tout l’enjeu de la coopération interrégionale, impliquant l’idée de proximité uniquement dans un objectif de fonctionnement, dans lequel l’individu en tant que tel serait relégué au second plan. Cette complexité à trouver une expression adéquate traduit cette difficile balance entre la poursuite d’un objectif de cohésion économique et celui de cohésion sociale entre les individus (Wassenberg, 2010 : 111).

Toutefois, l’objectif de cohésion sociale doit pouvoir considérer la question linguistique, et malgré des initiatives des projets transfrontaliers menés en ce sens, il convient de dépasser l’usage du tout anglais et de contrer cette mauvaise connaissance de la langue du voisin évoquée plus haut. Selon nous, cela vient du fait que la dimension interculturelle ne semble pas être considérée dans son contexte. Autrement dit, la langue-culture du partenaire voisin doit être envisagée en relation avec le contexte socio-politico-économique du Rhin supérieur afin de garantir une authenticité des échanges et donc une meilleure compréhension interculturelle transfrontalière. C’est pour cela que la mise en place d’une formation linguistique interculturelle transfrontalière pour les employés d’Eucor nous semble à la fois pertinente et urgente.

2. Le tandem linguistique transfrontalier

Bien que les origines de la méthode tandem remontent aux années 1970, celle-ci a gagné en importance ces dernières années. L'Université de Bochum (Böcker et Stauch, 2015) et l'Office franco-allemand pour la Jeunesse ont joué un rôle clé dans le développement de cette méthode, que Helmling et Brammerts (2002) définissent comme une méthode reposant sur les principes de réciprocité, demandant un soutien en partenariat durant lequel chacun apporte savoirs et savoir-faire que l’autre cherche à acquérir en étant responsable de ses propres progrès et de ceux de son partenaire, d'autonomie car chacun choisit comment atteindre ses objectifs, ainsi que la réflexivité (Tassinari, 2010 : 203). Brammerts (2002 : 19) résume les aspects fondamentaux du tandem linguistique comme suit :

Dans l’apprentissage des langues en tandem, deux locuteurs de langues maternelles différentes communiquent pour mener ensemble et mutuellement leur apprentissage. Ce faisant, tous deux cherchent à perfectionner leur compétence de communication dans la langue maternelle de leur partenaire, à approfondir leurs connaissances sur la personnalité et la culture de leur partenaire, à profiter des connaissances et des expériences de celui-ci […].

Les échanges en tandem sont accompagnés par deux tuteurs. Dans le cadre de la formation « Communiquer dans la langue de l’Autre », il s'agissait d'une tutrice de langue allemande, également professeure de DaF[7], et d'une tutrice de langue française, également professeure de FLE. Le rôle du tuteur dans le cadre du tandem linguistique diffère du rôle traditionnel de celui de l’enseignant de langue en ce sens qu’il propose une initiation à la méthode tandem et à l'apprentissage en autonomie (Brammerts et al., 2002 : 59-66 ; Ciekanski et Kleppin, 2017, 135-147). Les avantages et conditions nécessaires pour un tel type d'apprentissage sont les conseils méthodologiques comme la manière de corriger les erreurs, la présentation des outils de travail pour mener à bien un apprentissage auto-dirigé (Böcker et Kleppin, 2017 : 47-91) que constituent la délimitation des objectifs d'apprentissage avec son partenaire tandem, ainsi que le contrat d'apprentissage, le bilan de réflexion semestriel et les séances de « coaching » (Spänkuch, 2015 : 381-406). 

Dans notre contexte, le tandem linguistique se distingue du tandem à distance[8]puisqu’il est facilité par une régularité des échanges en raison de la proximité géographique, pouvant ainsi combiner le présentiel et l’échange à distance selon les envies et besoins des partenaires. Cette constellation leur permet de vivre la langue-culture de l’Autre au niveau du quotidien.

2.1 Les dispositifs mis en place par l’Université de Haute-Alsace

Au sein de l'UHA, le tandem linguistique tutoré (Terler et Kulovics, 2015) est proposé depuis 2011, grâce au soutien de NovaTris (ANR-11-IDFI-0005), aux étudiants de plusieurs cursus intégrés transfrontaliers entre l'UHA et les universités de Fribourg-en-Brisgau (Cursus Intégré pour la Formation Transfrontalière des enseignants en école primaire, Regio Chimica et Regio Informatica) ainsi qu'aux autres étudiants simplement intéressés par cette méthode d'apprentissage (bureau tandem, école d’été franco-germano-suisse Die Brücke, formation de formateurs du tandem linguistique et formation continue « Communiquer dans la langue de l’Autre »). 

Dans le cadre de l'innovation pédagogique dans l'enseignement des langues, NovaTris a notamment invité Brigitte Helmling de l'Institut Goethe en 2011 et 2012, afin de former les enseignants de l'UHA à la méthode tandem et au tutorat de l'apprentissage auto-dirigé. Dans un second moment, les futurs tuteurs ont également été formés par les experts de l'Université de Bochum (Allemagne), Karin Kleppin et Jessica Böcker, et ceux de l'Université de Vienne (Autriche), au concept de e-Tandem, par Julia Renner (Renner, 2017) et Yasmin El Hariri (El-Hariri, 2016).

2.2 Une méthode cohérente pour apprendre à communiquer avec le partenaire 

En utilisant la méthode du tandem linguistique transfrontalier, NovaTris a proposé en partenariat avec le CLAM (Certifications et Langues par Apprentissage Multimédia) de l’UHA et l’Ecole de Langues de l’Université Albert Ludwig de Fribourg-en-Brisgau (Sprachlehrinstitut), une formation linguistique et interculturelle continue[9]ayant pour objectif de mieux communiquer dans la langue du partenaire. Cette formation s’est déroulée en deux temps avec une durée totale de cinq jours : la première session en octobre 2017 à l'UHA et la seconde en février 2018 à l'Université de Fribourg-en-Brisgau.

La formation « Communiquer dans la langue de l'Autre » s’adressait en priorité aux personnels des universités du réseau Eucor –Le Campus européen (administratifs et enseignants-chercheurs). Le groupe était composé de 50% de personnes de langue maternelle française et de 50% de personnes de langue maternelle allemande afin de faciliter l’interaction dans et entre les deux langues avec un pré-requis A2/B1 du CECRL. L’objectif principal de cette première édition de la formation était d’améliorer sa capacité à communiquer dans la langue de l’Autre et de mieux appréhender le contexte transfrontalier et les situations interculturelles inhérentes à celui-ci afin de favoriser la rencontre entre les membres et de créer des réseaux transfrontaliers.

Le programme s'est basé sur diverses modalités pédagogiques selon différentes approches : sensibilisation et accompagnement interculturels, autoformation accompagnée en langue, atelier théâtre-langue, ainsi qu’un tandem linguistique tutoré. Entre les deux sessions, un dispositif de tandem à distance est venu compléter la formation.

Dans notre contexte, les principes du tandem sont d’autant plus pertinents qu’ils permettent une transférabilité des compétences acquises par ce dispositif dans le contexte professionnel transfrontalier que représente Eucor – Le Campus européen : écoute de l’Autre, empathie, sentiment de cohésion et identification à l’espace commun qu’est le Rhin supérieur, etc.

3. L’apprenant adulte en contexte frontalier : facteurs socio-affectifs à considérer

La particularité commune à l’ensemble de nos participants est le fait qu’ils soient adultes et membres d’un même réseau. Ce qui nous intéresse ici sont les particularités du public apprenant adulte de la langue du partenaire en contexte frontalier, et plus précisément les facteurs socio-psychologiques et affectifs liés à ce statut. Puisque nous nous intéressons à leur formation linguistique et interculturelle, il convient de s’intéresser à leurs savoirs, savoir-faire, mais aussi à leur savoir-être, autrement dit « les facteurs personnels liés à leur personnalité propre et caractérisées par les attitudes, les motivations, les valeurs, les croyances et les types de personnalité qui constituent leur identité » (Conseil de l’Europe, 2001 : 84).

Bien que ces variables socio-psychologiques et affectives n’interviennent pas dans l’acquisition de la langue maternelle, elles ont un rôle décisif dans l’apprentissage d’une langue seconde(Lazarova-Nikoska, 2004 : 5). De plus, le contexte frontalier, en raison d’une hypersensibilité constante à l’altérité due aux flux transfrontaliers quotidiens, est à même de générer des représentations sur le voisin et sa langue-culture (Putsche, 2011).

3.1 Les représentations sociales de la langue du partenaire et de son apprentissage

En DDLC, l’influence des représentations sociales sur l’apprentissage d’une langue-culture étrangère n’est plus à démontrer, puisqu’elles permettent« de rendre compte des sources et références multiples (psychologique, affective, sociale, cognitive...) mobilisées dans un processus d’apprentissage et d’enseignement des langues » (Castellotti et Moore, 2002 : 9). De plus, bien que celles-ci soient partagées par un même groupe social et qu’elles se construisent par et dans l’interaction entre les individus, elles « constituent des productions symboliques émotionnelles partagées qui s’expriment de manière différenciée dans la subjectivité individuelle » (Gonzalez-Rey, 2008 : 111).Et c’est justement cette expression différenciée qui nous intéresse et que nous avons recueillie à travers le discours, puisque les représentations sociales ne sont pas directement observables, afin de comprendre comment les participants se représentent leur propre motivation et leur rapport à la langue dans ce contexte socio-politico-géographique particulier. 

L’autre point sur lequel nous souhaitons insister est la dimension émotionnelle comme composante affective de la représentation sociale, jouant un rôle « dans la signification attribuée à un objet de représentation et celui de déterminant des conduites » (Bouriche, 2014 : 200). Ce dernier point renvoie par ailleurs au concept d’attitude, défini par Moscovici comme la position, le jugement appréciatif que prend l’individu face à l’objet en question et qui dépend directement de la représentation (Moscovici, 2013 : 145). Ainsi, nous pouvons partir du principe que l’expression d’une émotion par rapport à l’objet qu’est la langue du partenaire sera également un indicateur légitime pour nous renseigner sur les représentations des participants.

De plus, si les représentations sociales nous intéressent tout particulièrement dans notre contexte, c’est que nous nous situons dans une région transfrontalière où le partenaire se trouve à proximité et qu’il est plus que probable que nos participants aient un vécu transfrontalier aussi bien professionnel que privé, les ayant amenés à être en contact avec cette langue ou ayant entendu des discours sur celle-ci liés au contexte géographique. Cette zone de contact et d’interactions favorise donc l’émergence de représentations pas nécessairement positives : « ce qui caractérise les espaces frontaliers est la défense identitaire qui tend à exacerber ces jugementsdépréciatifs pour renforcer les particularités positives de sa propre culture » (Breugnot, 2013 : 125).Les représentations sociales en région frontalière sont donc également un moyen de se « protéger » face à une confrontation constante à l’altérité.Celles-ci peuvent d’ailleurs être considérées comme une forme de résistance pour pouvoir accéder à une identité transfrontalière (Koukoutsaki-Monnier, 2014 : 25).

3.2 Motivation, désir et estime de soi

La théorie nous ayant paru la plus adéquate pour constituer notre cadre d’analyse est le modèle d’auto-détermination de Ryan et Deci (2000), s’inscrivant dans un paradigme cognitif et supposant deux types de motivation : intrinsèque et extrinsèque.

La motivation intrinsèque, c’est-à-dire le fait d’être curieux et de retirer de la satisfaction dans la réalisation d’une activité uniquement pour ce qu’elle est, est inhérente à tout individu depuis sa naissance. Toutefois, les deux chercheurs précisent bien que pour que cette motivation puisse s’épanouir, celle-ci demande l’existence de conditions favorables, comme notamment le fait de donner un sentiment d’autonomie à l’individu, se sentant ainsi moins contrôlé, mais reconnu comme capable de s’autogérer (Ryan et Deci, 2000 : 70). Celle-ci est donc particulièrement importante dans notre étude car la méthode du tandem linguistique se base sur l’autonomie. Ainsi, nous pouvons en déduire que cette méthode peut venir favoriser la motivation intrinsèque de nos participants, se sentant alors « capables », venant favoriser l’estime de soi dans l’apprentissage de la langue. A ce propos, Arnold (2006 : 415) affirme que l’estime de soi est conditionnée par l’image que l’on a de soi et que, si celle-ci est positive, l’apprentissage sera alors soutenu. Il nous paraît également intéressant de relier la motivation intrinsèque au concept de désir, car le simple fait de s’approprier une autre langue que sa langue d’origine constituerait alors un plaisir « gratuit » et inconscient (Anderson et Laseldi-Grelis, 2003 : 356).

Le deuxième type de motivation est la motivation extrinsèque, conditionnée par des facteurs extérieurs, existant sous quatre formes différentes aux motifs d’engagement externes et internes : la régulation externe (pour satisfaire une demande extérieure), la régulation introjectée (pour éviter l’anxiété, l’échec et maintenir le sentiment d’estime de soi), la régulation identifiée (l’action est considérée comme importante sur le plan personnel car valorisée par l’extérieur) et la régulation intégrée (l’action est assimilée à un besoin personnel) (Ryan et Deci, 2000 : 71-72). La dernière nous intéresse particulièrement car elle peut s’apparenter à la motivation intrinsèque, en ce sens que l’assimilation à un besoin personnel peut conduire à un engagement plus autonome que la motivation externe à régulation externe par exemple. De ce fait, nous pensons que les objectifs d’Eucor – Le Campus européen en matière de cohésion interrégionale entre les membres du réseau, puissent tout à fait engendrer des motivations extrinsèques à régulation identifiée, voire intégrée. 

4. Cadre méthodologique

4.1 Démarche retenue

Nous rappelons que l’objectif initial de notre recherche est de s’orienter vers un changement des pratiques : celui d’optimiser la formation « Communiquer dans la langue de l’Autre », afin de correspondre aux objectifs de la coopération transfrontalière, en tenant compte des représentations des participants. 

A travers le recueil et l’analyse de leur discours, nous avions pour objectif de produire de la connaissance, afin de pouvoir réajuster les éventuelles prochaines éditions de la formation. En ce sens, notre démarche est résolument qualitative, puisque nous visons la compréhension de nos informateurs dans un contexte donné et non la mesure de variables (Dumez, 2011 : 50). En plus de la perspective compréhensive, notre démarche s’inscrit dans une volonté de changement, afin de contrer le recul du bilinguisme dans la région du Rhin supérieur, constaté par les institutions transfrontalières. Pour parvenir à cette évolution, nous avons donc collaboré et endossé le rôle de « praticiennes-chercheuses », puisque nous sommes à la fois les chercheuses mais aussi les enseignantes intervenant au sein de la formation pour l’édition 2017-2018. Nous nous définissons ainsi parce que « l’activité professionnelle génère et oriente l’activité de recherche, mais aussi de façon dialogique et récursive, que l’activité de recherche ressource et réoriente l’activité professionnelle » (De Lavergne, 2007 : 29). Cette double posture nous demande donc une certaine part de réflexivité afin de rester critique par rapport à notre propre enseignement.

Du fait de notre objectif d’évolution des pratiques pour répondre au dysfonctionnement évoqué ci-dessus et de notre démarche collaborative, notre cadre méthodologique possède certaines caractéristiques de la recherche-action en répondant à la logique spiralaire de ses cinq phases constitutives (Macaire, 2007 : 107) que sont :

- La phase diagnostic de la situation problème : coopération transfrontalière menacée en raison d’une mauvaise connaissance de la langue du voisin dans le Rhin supérieur ;

- La prise de décision des praticiens et des chercheurs sur les actions à mener qui débouche sur un plan d’action : mise en place d’une formation linguistique et interculturelle basée sur le tandem linguistique transfrontalier pour le personnel du réseau Eucor ;

- L’analyse postérieure à l’action des effets et ajustements par rapport à des incidents critiques : distribution de questionnaires ouverts à la fin de la première session de la formation et la conduite d’entretiens semi-directifs en fin de seconde session afin d’obtenir des indicateurs sur les représentations des participants quant à leur(s) motivation(s) d’apprentissage de la langue du partenaire par le tandem ;

- La phase d’évaluation : analyse qualitative des questionnaires et des entretiens[10] ;

- Une phase de rétroaction et transfert : cette phase n’a pu aboutir pour le moment car pour des raisons diverses, nous n’avons pas pu conduire la nouvelle édition de la formation, ni eu l’occasion d’y réinvestir nos résultats de l’étude. Toutefois, il se pourrait que cela puisse voir le jour lors d’une autre édition ou bien sous forme d’une nouvelle formation[11].

4.2 Protocole de recherche, recueil et analyse des données

Notre cohorte était constituée des 16 participants à la formation, possédant chacun au minimum le niveau A2 du CECRL dans la langue du voisin, et au maximum, le niveau B2.

Les 16 participants comprenaient cinq membres de l’Université Albert-Ludwig de Fribourg-en-Brisgau (un enseignant-chercheur en sciences cognitives et quatre membres du personnel administratif), neuf membres de l’UHA (quatre membres de NovaTris, deux enseignants-chercheurs en chimie et sciences de l’éducation, deux doctorantes en littérature et information-communication et une technicienne multimédia du centre de langues) et deux de l’Université de Strasbourg (une chargée de mission service civique et un enseignant-chercheur en sciences cognitives). Les universités de Karlsruhe et de Bâle n’ont pu être représentées lors de cette première édition. 

Le recueil de données a eu lieu quelques semaines après la deuxième session, sous forme d’entretiens individuels semi-directifs, afin que les participants bénéficient du recul nécessaire. Si nous avons privilégié l’entretien, c’est qu’il nous permettait un accès direct aux représentations des participants (Baribeau et Royer, 2012 : 26).

Les données ont été analysées selon l’analyse de contenu thématique, que Paillé et Mucchielli (2016 : 236) définissent comme le fait de « […] procéder systématiquement au repérage, au regroupement et, subsidiairement, à l’examen discursif des thèmes abordés dans un corpus », nous ayant permis de dégager les catégories les plus pertinentes.

5. Analyse des principaux résultats

Dans cette ultime partie nous illustrerons les catégories qui ont émergé de notre analyse à l’aide d’extraits choisis tirés des entretiens semi-directifs.

5.1 L’influence négative du parcours scolaire vs. l’influence positive du parcours personnel

Les deux extraits suivants illustrent les deux tendances qui se sont dégagées de notre analyse :

CF:Ich habe nicht „ich heiße X“ gelernt, sondern „mein Name ist, quel est ton nom? Mon nom est “ ähm ja und da wurde ich, das lag aber an der Lehrerin, sehr stark gestraft und in der Behavioral-Psychologiegibt es da ein Konditionierungsmechanismus für jeden Fehler, die ich gemacht hab‘ und ich habe eine lange Zeit eine Aversion eigentlich gehabt gegen die Sprache[...] das hat mit der Lehrerin zu tun [...] und nicht mit der Sprache, aber das checken ja Kinder nicht[12].

VPF2 :Ich wollte immer halt schon Französisch lernen [...] die Motivation, die innere war immer da       und es hat sich eigentlich erst so richtig ergeben, als wir dann hier in Freiburg waren, dass ich   dann gesagt habe, jetzt bin ich auch an der Grenze und möchte ich das eigentlich noch lernen      [...] dann war es einfach schön, dass die Gelegenheit kam, ja, nach Montreal eben zu gehen       [...][13].

La première tendance, correspondant au premier extrait, concerne les représentations et attitudes plutôt négatives étroitement liées au passé scolaire. En effet, chaque participant interrogé qui exprimait avoir d’abord eu des représentations négatives de la langue du partenaire évoquait systématiquement son parcours scolaire comme raison à cela, et plus précisément, la figure de l’enseignant, comme c’est le cas dans ce premier extrait. CF illustre cela en précisant que le fait d’avoir été puni pour ses erreurs l’a conditionné en défaveur de l’apprentissage de la langue, l’ayant conduit jusqu’à ressentir une véritable « aversion » pour celle-ci. La notion d’échec est donc fortement corrélée à l’image que l’apprenant se fait de lalangue :

[…] la langue et le vécu lié à son apprentissage (notamment scolaire) interviennent comme un facteur important ; ils établissent ainsi une relation entre les jugements de difficulté et de réussite dans l’apprentissage et la valorisation du pays concerné. (Cain et de Pietro, 1997 cités dans Castellotti et Moore, 2002 : 12)

CF poursuit en précisant qu’il n’était pas capable de différencier sa relation à la langue, de sa relation à l’enseignante. Une fois à l’âge adulte, il semble avoir pris un certain recul par rapport à son passé en tant qu’apprenant de français et être tout à fait conscient de l’origine de ses représentations négatives. Ce dernier point nous montre bien que les représentations ne sont pas figées et qu’elles sont amenées à évoluer du moment qu’elles sont conscientisées.

Le second extrait illustre la deuxième tendance, à savoir qu’une représentation et attitude positives face à la langue sont d’abord liées à une motivation intrinsèque de l’apprendre (curiosité et désir personnel) qui sera, dans un second moment, confirmée par le parcours individuel. En effet, bien que VPF2 précise avoir toujours voulu apprendre le français, elle évoque deux facteurs décisifs : le déménagement à la frontière franco-allemande et un long séjour à Montréal. On retrouve ici l’idée de volonté d’intégration, de désir d’appartenance à la communauté des locuteurs de la langue cible. Ce point rejoint l’orientation intégrative de la motivation telle que la définit Gardner (1985 : 54).

On peut donc en déduire que la motivation de participer à la formation poursuit deux orientations : dépasser ses représentations d’apprenant, conscient du blocage que cela puisse engendrer dans l’apprentissage de la langue, et celle de se rapprocher du voisin, comme si la proximité géographique faisait naître chez eux une motivation supplémentaire de rapprochement avec cette autre langue-culture. 

5.2 Réapprendre la langue en tandem pour oser la prise de parole

VPM3 :[…] pas seulement des compétences linguistiques pures, mais les compétences de, d’oser prendre la paroleetc., de s’dire ben voilà c’est pas grave si j’me trompe, les gens vont pas me rire au nez, des choses comme ça, c’est vrai que souvent, on a un peu ce complexe là en Franceavec les langues. On remarque souvent que les gens n’osent pas, car on n’a pas l’accent qu’il faut […].

VPM4 :Ce qui était bien c’est que comme on était tous là pour améliorer sa langue, il n’y avait pas de jugement quand on parlait dans la langue de l’autre et ça c’était vraiment très agréable car c’est souvent ce qui nous bloque.

Ces deux nouveaux extraits soulèvent la pertinence du tandem linguistique comme moyen de dépasser le risque que constitue la prise de parole en langue étrangère et qui peut être aisément mis en relation avec ce que Horwitz et al. appellent Foreign language anxietyet qu’ils définissent comme une construction complexe « of self-perceptions, beliefs, feelings, and behaviours related to classroom language learning arising from the uniqueness of language learning process » (Horwitz et al., 1986 : 128). Bien que nos deux participants n’évoquent pas explicitement le contexte scolaire, on peut tout à fait imaginer que la peur du jugement comme conséquence de l’erreur, VMP3 parle de « se tromper », soit fortement corrélé à leur passé en tant qu’élève. De plus, nos deux interviewés, de par leur travail et leur appartenance au réseau Eucor – Le Campus européen, se retrouvent régulièrement amenés à s’exprimer dans la langue du partenaire lors de réunions transfrontalières, qui correspondent, tout comme la salle de classe, à une situation de prise de parole en public. Un autre élément qui nous interpelle dans la citation de VPM3 est l’explicitation qu’il fait d’une représentation sociale, en parlant d’un véritable « complexe » chez les Français face à leur accent qui ne serait pas « comme il faut », renvoyant à l’idée d’une norme unique, celle du locuteur natif, et de laquelle il faudrait se rapprocher pour être reconnu comme compétent dans la langue cible.

Ce blocage correspondant à la peur du ridicule et de ce que vont penser les autres est définitivement lié à l’estime de soi, que seule une relation de confiance et de bienveillance avec l’Autre permet de dépasser : « un environnement émotionnellement sécurisant qui laisse une place à l’empathie, à la préservation de l’estime de soi, sera alors un gage de réussite pour l’apprenant » (Riquois, 2018). Et c’est justement ce que semble leur apporter le tandem.

5.3 Recherche d’authenticité et de contact à travers le tandem linguistique

CS :[…] pour un enseignant dans ma discipline ça changera pas grand-chose parce qu’on parlera anglais. Après il y a quand même un côté, si on parle anglais, un côté germanique et le côté très latin, on les voit, on les observe quand même, mais euh moi dans mon travail, ça m’apportera pas grand-chose j’pense. Peut-être parce que […] j’étais au courant d’un certain nombre de choses aussi, mais ça peut être utile pour des gens qui vont travailler vraiment euh proches les uns des autres, ‘fin régulièrement.

VPF1:  Im Moment brauche ich die französische Sprache noch nicht, ich hoffe ja jetzt, dass ich da irgendwie da reinkomme, weil mich interessiert das Thema ja und nachdem ja unser oberster Chef hier so sehr das forciert, da hoffe ich, dass ich doch da auch noch mehr mit zu tun haben werde[14].

VPM4 :Pour moi le tandem c’est presque plus que linguistique. C’est vraiment une rencontreavec une autre personne qui là s’avère être linguistique car qui parle une autre langue, mais à travers l’échange linguistique tu découvres qui est cette personne, tu échanges sur des anecdotes et tu découvres vraiment une autre personne […].

Bien que la maîtrise de la langue du partenaire soit un des objectifs encouragés par Eucor – Le Campus européen, les deux premiers extraits insistent sur le fait qu’ils n’en ont pas « besoin ». Si CS évoque comme raison à cela la place prépondérante de l’anglais dans sa discipline[15], il reconnaît l’importance de la dimension culturelle. Si l’anglais reste la langue de communication, la compréhension des codes culturels n’en reste pas moins importante pour une bonne relation de travail. Toutefois, bien que CS insiste sur le fait qu’il ait participé à la formation de son propre chef et que ce ne soit ni une directive de sa hiérarchie, ni un besoin, nous pensons que sa motivation reste motivée par un désir de contact et d’authenticité des échanges qu’il ne rencontrera pas au niveau professionnel. On apprend par ailleurs plus loin dans son interview que CS vit en Allemagne et qu’il est donc travailleur transfrontalier. Nous pouvons donc en déduire que la vie de transfrontalier n’implique pas forcément une relation d’échange entre les individus situés de part et d’autre de la frontière. 

Pour VPF1, l’accent est plutôt mis sur l’aspect linguistique que sur la relation avec le partenaire. Elle nous apprend que son chef encourage l’apprentissage du français, ce qui pour elle est un gage de pratique plus fréquente du français, représentant un désir personnel. Cependant, nous pouvons penser que sa motivation est extrinsèque à régulation identifiée : elle considère la pratique de la langue du partenaire comme importante pour elle d’autant plus que c’est valorisé par sa hiérarchie.Pour VPM4, nous retrouvons cette découverte de l’Autre en tant qu’individu. Ce rapprochement, que ne permettent pas forcément les situations professionnelles, est alors permis par le tandem linguistique, lui donnant ainsi l’occasion d’accéder à plus qu’un simple « représentant » de la langue-culture du partenaire et d’arriver à une véritable décentration (Eschenauer, 2013 : 91).

5.4 Un réel besoin de cohésion

VPF1:   Da müsste man, keine Ahnung, so eine Art virtuellen Stammtisch für die Verwaltungsmitarbeiter für das Thema Eucor oder so was aufbauen, um dann diese Austauschgruppenzu bilden. Ich glaub‘, es wird viel zu sehr jetzt darauf Wert gelegt, das für die Studierenden, für die Forschenden, vielleicht für die Lehrenden interessant zu gestalten, aber die ganzen anderen Mitarbeiter, die fallen irgendwie da ein bisschen hinten runter,die identifizieren sich nicht da nicht so mit, die sehen auch keinen Anlass, warum sie da sich reinbegeben sollen [...][16].

CS : […] j’pense que politiquement c’est important qu’elle existe cette formation si on veut rapprocher les gens au sein d’Eucor […] par contre on était que deux enseignants, ça doit pas être facile à mobiliser […] Mais faut dire que la diffusion de la formation, elle a pas été confidentielle, mais je l’ai vue dans la lettre d’Eucor parce que je suis abonné à la lettre d’Eucor, parce que je fais des choses avec le campus européen et parce que l’allemand m’intéresse. Quelqu’un qui n’a pas ce centre d’intérêt là, ben c’est pas visible, voilà.

CF:  Meine Einstellung war gut, die Neugier wurde genährt und ich hab‘ jetzt noch mehr Neugier. [...] Ich bin nach Breisach mit dem Fahrrad gefahren in zwei Stunden und fünf Kilometer weiter ist Colmar. Also, als Frankreich kurz davor war Weltmeister zu werden, habe ich geschaut, ob es regnen würde in zwei Stunden und habe beschlossen, ja, wenn die Weltmeister werden, dann möchte ich das in Colmar sehen und dann bin ich mittags losgefahren. Ich hab‘ dort zu Abend gegessen und bin dann wieder nachhause gefahren[17].

Ces trois extraits nous renseignent sur un point nous paraissant important : participer à la formation « Communiquer dans la langue de l’Autre » c’est répondre à un besoin de cohésion au sein du réseau Eucor – Le Campus européen, certes encouragé au niveau politique et institutionnel, mais ne trouvant, selon les participants, encore que trop peu d’échos dans la réalité. VPF1 parle du fait que le personnel administratif semble être oublié, ou du moins qu’il est « relégué au second plan » et que si l’on souhaite rapprocher les individus et favoriser la coopération à tous les niveaux, cela devrait concerner tout le monde, et non que les enseignants-chercheurs ou les étudiants[18]. Il y a donc bien un manque à combler et un désir à assouvir que VPF1 exprime en proposant des solutions concrètes de rapprochement comme laStammtisch virtuelle. De plus, elle parle d’« identification », comme si pour elle, appartenir à ce réseau serait pouvoir se donner une identité de « transfrontalier ».

Bien que VPF1 insiste sur le fait qu’Eucor – Le Campus européen privilégie les enseignants-chercheurs aux autres membres du personnel, CS déplore quant à lui le manque de participation des enseignants, qui, d’après lui, serait due à une mauvaise visibilité des formations comme celle que nous prenons pour objet d’étude. Selon lui, participer à cette cohésion au sein d’Eucor relève d’une initiative avant tout personnelle. Ce manque de visibilité d’évènements transfrontaliers se retrouve par ailleurs également au niveau de la vie publique, venant alors ralentir le processus de cohésion interrégionale et donc de sentiment d’appartenance à la région transfrontalière du Rhin supérieur dans son ensemble (Faucompré, 2019 : 116).

Selon CF, la formation est venue « nourrir » sa curiosité et son désir de cohésion avec le partenaire à des fins plus personnelles que professionnelles. Cela s’est traduit chez lui par une véritable recherche de « vivre avec » le voisin des évènements du quotidien pour pouvoir partager avec lui plus qu’une relation professionnelle, mais bien des émotions positives, comme celles que peut susciter la victoire de la Coupe du Monde de Football.

6. Discussion et pistes de conclusion

Après avoir explicité les raisons pour lesquelles le contexte transfrontalier du Rhin supérieur, et plus précisément celui d’Eucor – Le Campus européen, constituait un lieu idéal et privilégié pour la cohésion transfrontalière et interrégionale, nous avons relevé quelques obstacles, comme la mauvaise connaissance de la langue-culture du partenaire, mettant alors cette cohésion dans une position fragile. Dans un second moment, nous avons pu constater que proposer une formation au tandem linguistique transfrontalier pour les membres du réseau Eucor, pouvait constituer une proposition de solution pertinente, puisqu’elle répond à la fois aux exigences et aux enjeux liés directement à ce contexte. Cependant, afin de pouvoir reproposer et optimiser continuellement cette formation linguistique et interculturelle, il convenait de s’attarder sur les motivations et représentations des participants, alors directement concernés. 

Nos résultats ont non seulement montré qu’apprendre et/ou réapprendre la langue du partenaire n’était pas forcément assez encouragé par les institutions transfrontalières concernées mais que sans désir personnel, et donc sans motivation intrinsèque forte, la motivation professionnelle ne pouvait se suffire à elle-même. Toutefois, il ressort de notre analyse que ce désir personnel de cohésion avec le partenaire dans ce contexte transfrontalier ne pouvait être assouvi que par un engagement plus important de la part du réseau Eucor – Le Campus européen.

Enfin, nous retiendrons que le tandem linguistique transfrontalier a permis à nos participants de conscientiser leur relation à la langue-culture du partenaire et de dépasser ainsi leurs émotions et représentations négatives, fortement liées à leur passé scolaire en tant qu’apprenant de langue. De ce fait, se pose désormais la question de la continuité de cette formation, comme gage d’une meilleure cohésion au sein d’Eucor. Bien que celle-ci ait pu être reproposée lors d’une seconde édition pour l’année universitaire 2018/2019, il conviendrait de se poser la question d’une formation peut-être davantage axée sur la poursuite des tandems constitués après le déroulement de celle-ci, avec un suivi personnalisé des intervenants sur la durée, ainsi qu’une mise en réseau des différents participants aux éditions précédentes.

 

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[1] Programmes lancés par l’UE à la fin des années 1980 et soutenus financièrement par le Fonds européen de développement régional, permettant ainsi la conduite de projets transfrontaliers communs au sein d’une même région transfrontalière :  http://www.interreg-rhin-sup.eu/[15.05.2019]. 

[2] Centre de compétences transfrontalières de l’Université de Haute-Alsace : http://www.novatris.uha.fr/ [30.04.2019].

[3] Le 12 avril 2018 le Ministre-Président du Land du Bade-Wurtemberg, le Président de la Région Grand Est et la Rectrice de l'Académie de Strasbourg ont signé une déclaration pour faire du GECT Eucor – Le Campus européen une université européenne : https://www.uha.fr/2018/04/12/luniversite-europeenne-verra-le-jour-dans-le-rhin-superieur/  [30.04.2019].

[5] Dispositif financier mis en place pour favoriser les échanges transfrontaliers en matière de recherche : https://www.eucor-uni.org/seed-money/[30.04.2019].

[6] https://www.eucor-uni.org/nous-connaitre/objectifs-du-campus-europeen/  [30.04.2019].

[7] Deutsch als Fremdsprache(allemand comme langue étrangère).

[9] En raison du grand succès de la première édition, une deuxième formation « Communiquer dans la langue de l'Autre » a été proposée entre novembre 2018 et mars 2019 à l'UHA en coopération avec les universités de Karlsruhe et de Bâle : https://www.eucor-uni.org/communiquer-dans-la-langue-de-lautre/  [30.04.2019].

[10]  Cette contribution s’occupe uniquement de l’analyse des entretiens semi-directifs conduits à la fin de la première édition de la formation.

[11] Nous ne sommes pas en mesure de donner plus d’informations à ce sujet pour le moment.

[12] Traduction : « Je n’ai pas appris “je m’appelle X“, mais “mon nom est, quel est ton nom ? Mon nom est” et euh oui et là, ça venait de l’enseignante, j’ai été sévèrement puni, et dans la psychologie comportementale il y a un mécanisme de conditionnement, pour chaque faute que j’ai faite et j’ai longtemps eu une aversion pour cette langue […] ça vient de l’enseignante […] et pas de la langue, mais ça les enfants ne l’intègrent pas. ».

[13] Traduction : « J’ai toujours voulu apprendre le français […] la motivation intrinsèque a toujours été là et ça a seulement pu vraiment se faire quand on est arrivé ici à Fribourg, que j’ai dit, maintenant je me trouve à la frontière et en fait j’aimerais encore l’apprendre […] et ensuite c’était tout simplement bien que l’occasion d’aller à Montréal se soit présentée […] ».

[14] Traduction : « Pour le moment je n’ai pas encore besoin du français, j’espère que là, maintenant, je vais d’une manière ou d’une autre me remettre dans le bain, parce que ça m’intéresse et comme notre chef supérieur insiste beaucoup dessus, j’espère que là je vais encore plus y être confrontée ».

[15] CS est chercheur en sciences cognitives.

[16] Traduction : « Il faudrait mettre en place, aucune idée, une sorte deStammtisch[table des habitués] virtuelle pour le personnel administratif sur le sujet Eucor ou quelque chose dans le genre, afin de former ensuite des groupes d'échange. Je pense qu’en ce moment on met beaucoup trop l’accent sur les étudiants, sur les chercheurs, peut-être sur les enseignants, mais tous les autres membres du personnel, ils sont un peu relégués au second plan, ils ne s'y identifient pas, et donc ils ne voient aucune raison pour laquelle ils devraient s’investir [...] ».

[17] Traduction : « Ma représentation était positive, ma curiosité a été alimentée [par la formation], et je suis désormais encore plus curieux. […] Je suis allé à Breisach à vélo en deux heures, et cinq kilomètres plus loin, il y a Colmar. Alors quand la France était sur le point de devenir championne du monde, j'ai regardé s'il allait pleuvoir durant les deux prochaines heures et j'ai pris ma décision, oui, quand ils deviendront champions du monde, je veux le voir à Colmar et donc je suis parti là-bas à midi. J'ai dîné là-bas et je suis rentré chez moi ».

[18] Nous pouvons à ce propos citer, entre autres, le premier Festival Eucor ayant eu lieu en mai 2019 à Bâle qui a réuni les étudiants des cinq universités du réseau autour d’ateliers, de visites et de la musique : https://www.skuba.ch/eucorfestival[14.05.2019]. 

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Réflexions et outils pour une meilleure identification des besoins en didactique du français sur objectif universitaire

Nadhir Douidi

Résumé La méthodologie du français sur objectif universitaire (désormais FOU) développée par Mangiante et Parpette (2011), calquée sur la méthodologie du français sur objectifs spécifiques (FOS) des mêmes auteurs (2004) a fait l’objet de nombreuses recherches et applications, mais ne connaît à ce jour qu’une seule étude critique, celle de Richer, publiée en 2016. C’est ainsi que, faisant suite à des constats, expériences d’enseignement et recherches en lien avec la problématique de l’analyse des besoins langagiers et d’apprentissage en didactique du...

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