Écrire en langue additionnelle : un besoin de complexifier les modèles
In Memoriam: Abdelhafid Messaoudi[1]
Krastanka BOZHINOVA, American University in Bulgaria, kbozhinova@aubg.edu
Jean-Paul NARCY-COMBES, Université Sorbonne Nouvelle - Paris 3, Diltec, EA 2288, jean-paul.narcy-combes@wanadoo.fr
Abdelouahad MABROUR, Université Chouaïb Doukkali - LERIC (El Jadida, Maroc), abdelmabrour@yahoo.fr
Introduction
La recherche sur les processus mis en jeu dans la production écrite s’est progressivement enrichie bien qu’elle se soit développée plus tard que celle sur la compréhension de l’écrit et sur la production orale. Plusieurs modèles théoriques ont été proposés afin d’expliquer les facteurs qui influencent les processus de composition, leur nature et leurs interrelations. À la différence des premiers modèles qui suivaient une organisation linéaire, les modèles plus récents ont mis en avant le caractère récursif de l’écriture en tant qu’activité socialement située.
Cependant, peu de modèles se concentrent sur les processus qui relèvent de la production écrite en langue additionnelle(LA)[2] et abordent la complexité de la rédaction de l’apprenant/locuteur plurilingue et les facteurs qui la contraignent.
D’autre part, en ce qui concerne la didactique de l’écrit, il est nécessaire de « fonder l’apprentissage de l’écrit sur des bases plus solides » du point de vue théorique et pratique (Cuq et Gruca, 2005 : 186). Nous souhaitons montrer qu’il est possible de penser la modélisation de l’écriture et de son enseignement/apprentissage dans une perspective (socio)constructiviste en lien avec la conception d’un traitement langagier complexe et dynamique chez les apprenants/locuteurs plurilingues soutenu par le recours aux outils numériques actuels. L’objectif de l’article est de parvenir à une forme de modélisation souple des processus d’écriture en LA et des étapes pédagogiques pour les mettre en place.
L’écriture sera d’abord examinée comme une compétence trans/interculturelle, transdisciplinaire et comme un processus complexe bi-/plurilingue en lien avec la construction de la connaissance et de la compétence de production écrite. Seront alors présentés les modèles de production en langue initiale (LI), puis les modèles en LA qui se sont progressivement éloignés des précédents pour prendre en compte le bi/plurilinguisme des sujets. Il sera possible alors de proposer un modèle provisoire de l’écriture en LA et de se tourner ensuite, d’abord vers une didactique de l’écrit en LA, puis vers des propositions de pratiques afin d’illustrer le propos.
1. Écriture, construction de la connaissance et de la compétence de production écrite
1.1. Construction de la connaissance par l’écriture
L’écriture est, selon la formule de Norman (1993 : 18), un « outil conçu pour observer, exposer et traiter l’information dans le but de satisfaire une fonction représentationnelle ». La conception de cet outil repose sur la connaissance d’un code linguistique associé à des savoirs relatifs aux genres ou typologies textuelles (en LI). Quand un sujet écrit, c’est souvent pour expliciter, pour lui ou d’autres, des connaissances qu’il a découvertes. L’écriture contribue ainsi à la verbalisation de la pensée et, selon Lahire (1993, 2008), à la construction « d’une capacité accrue à la décontextualisation, la généralisation, la conceptualisation et la réflexivité » (Étienne, 2011 : 3-4). Des activités, telles que la prise de notes, le compte-rendu de lecture et le résumé permettent de verbaliser la saisie des connaissances. L’écrit est alors un « avatar » de ce que Vygotsky (1934/1986) a nommé le « langage égocentrique », discours transitoire entre une connaissance découverte et une connaissance à s’approprier où s’exprime ce qui a été saisi. Ecrire permet également d’atteindre des résultats, plus complexes et exigeants en termes de compréhension et de production, qui reposent sur des transformations à la fois des textes et des représentations. L’écrit est en fait plus qu’un outil, il est « au cœur de l’activité épistémique et de conceptualisation » (Guernier et Barré-De Miniac, 2009 : 203).
On ne peut conceptualiser l’écriture comme une activité linéaire ou un ensemble de processus qui vont se succéder jusqu’à la réalisation de la version la plus proche des normes du produit visé ou du projet envisagé. La génétique textuelle montre les façons dont les brouillons ou les avant-textes révèlent que l’auteur « cherche » son texte en même temps qu’il l’écrit (Fenoglio, 2007 : 34). Le « brouillon », la note préparatoire, comme toute projection d’un écrire à venir génèrent déjà du texte. Il s’agit non seulement de projeter, préparer, pré-voir un texte mais aussi de le chercher tout en l’écrivant.
L’activité d’écriture est également une situation de résolution de problèmes de type transformations d’états (Gresillon, 2007 : 34 ; Hyland, 2008 : 10 ; de Biasi, 2010). Le sujet écrivant a une idée du texte cible et met en œuvre diverses procédures (argumentatives, linguistiques, rhétoriques et méthodologiques) afin d’y parvenir. Dans le contexte éducatif, les textes intermédiaires correspondent à des formes d'écrit qui vont au-delà de transcrire et de transmettre une information, mais aident « à penser, à apprendre... et même […] à ‘se construire’ » (Chabanne et Bucheton, 2008 : 60). Pour Alcorta (2001 : 97), le brouillon est un « instrument psychologique », dans le sens d’un outil externe qui aide à construire et réorganiser des capacités internes. À travers l’étude des traces laissées dans le discours écrit, les travaux en génétique textuelle permettent d’éclairer des démarches qui caractérisent à la fois la production des scripteurs expérimentés et novices, dont les apprenants. L'écriture est considérée comme un travail de recherche qui passe par des modifications multiples, sans qu’elles soient perçues comme des manques (Fabre-Cols, 2004 : § 9 ; Fabre, 1991 : 52).
Le numérique facilite non seulement la recherche d’information et la lecture mais aussi les activités de résolution de problèmes et d’écriture individuelle et collaborative. Il est possible de proposer des scénarios pédagogiques qui intègrent l’outil « en tant que médiateur de la pensée » car il favorise la métaréflexion, la réécriture et la prise de distance affective et cognitive envers la production (Catroux, 2006). Le scripteur prend conscience des possibilités de modifier son texte à plusieurs reprises en approfondissant sa réflexion et en contrôlant la qualité du texte produit. Utilisés en tant qu’aides à l’écriture en LA, les outils numériques favorisent l’apprentissage à différents niveaux par exemple, « cognitif et communicationnel, linguistique, socioculturel et affectif, et celui des compétences transversales » (Gerbault, 2010 : 43). Par ailleurs, l’écriture sur support numérique facilite la participation à des échanges en ligne et élargit les possibilités de collaboration et d’interaction dans des contextes qui stimulent l’écriture créative et donnent du sens à l’activité de rédaction. La recherche met en lumière des avantages de la co-élaboration de documents écrits (wikis et éditeurs collaboratifs) concernant l’apprentissage et les processus cognitifs dont font partie la réflexion critique, la gestion des savoirs et la résolution de problèmes (Ollivier, 2016 : § 6).
D’autre part, selon Scardamalia et Bereiter (1989), écrire consiste à naviguer entre deux espaces-problèmes : l’espace du contenu (la discipline) où le sujet écrivant interroge ce qu’il sait, et l’espace rhétorique où il se pose des questions et cherche des solutions pour savoir dire. Selon Eisele-Hendersen (2000), on note deux seuils, un seuil de spécificité contextuelle (authenticité de la situation avec un seuil de cohérence) et un seuil de développement de l’interlangue (ici LA) (proficiency gap). Ceci induit que des exigences élevées au niveau du contenu entraînent des baisses qualitatives de la forme et qu’un développement linguistique peu avancé conduit à construire des énoncés qui juxtaposent les concepts disciplinaires comme des étiquettes, sans souci des formes de LA. Dans cette perspective, un apprenant progresse d’autant plus aisément dans les apprentissages qu’il a une maîtrise plus ou moins satisfaisante de ces deux sphères en sachant que les compétences en contenu sont transférables plus facilement. Lire en LI et en LA conjointement facilitera donc l’écriture en LA. Ce qui nous conduit à nous tourner vers LA avec un regard pluriel.
1.2. L’écriture, une compétence trans/interculturelle, transdisciplinaire et un processus complexe bi-/plurilingue
La compétence de production écrite en LA est liée étroitement à celle atteinte en LI, étant donné qu’on retrouve « certaines constantes » qui, cependant, se manifestent sous formes variables en fonction du niveau linguistique en LA et de la proximité ou des écarts entre les répertoires discursifs et textuels des langues et des cultures concernées (Cuq et Gruca, 2005). Par conséquent, en dépit d’un déjà-là chez les locuteurs qui sont capables d’adapter leur comportement langagier en reconnaissant les indices d’une activité discursive, pour un apprenant de LA, cette capacité est à reconstruire pour accommoder de nouvelles connaissances.
Dans les contextes d’utilisation d’une langue de scolarisation différente de la LI, l’écriture est plus efficace quand elle se fait dans la langue d’apprentissage sans exclure la langue initiale de socialisation. Pour Moro (2012 : 62), l’occultation de la langue de socialisation dans tout projet de formation constitue une « violence passive ». L’apprentissage se réalise entièrement quand la langue, comme les références culturelles qu’elle véhicule, ne sont pas vécues dans un conflit d’enjeux, de priorités ou d’utilité. De même, appliquant l’hypothèse du seuil de Cummins (threshold hypothesis) à l’acquisition de la LA, Cenoz et Genesee (1998 : 24-25) concluent qu’un atout plurilingue ne pourrait se réaliser qu’en cas de bilinguisme additif[3] qui pré-détermine le développement d’avantages cognitifs. Le concept de bilinguisme dynamique proposé par García (2009) reflète la complexité et la multimodalité de l’époque contemporaine qui engendrent des pratiques translangagières dans les contextes de communication variés (Narcy-Combes, M.-F. et al., 2019 : 15).
Les scripteurs plurilingues agissent comme des utilisateurs multicompétents d’une LA donnée, en s’appuyant sur les différentes langues connues et leurs connaissances multiples lors de la production écrite dans cette langue (Manchón, 2009). La production écrite de l’apprenant de LA est donc une activité nettement plurilingue. Il transfère des connaissances, des habiletés, et active des éléments de son répertoire plurilingue au niveau des processus et du produit (ibid. : 12). Plusieurs facteurs sont à considérer simultanément pour comprendre la complexité de l’acte d’écriture en LA, par exemple les langues disponibles et le niveau de leur maîtrise, l’expertise à l’écrit et l’expérience éducative (ibid. : 121 ; Wang et Wen, 2002 ; Gunnarsson et al. 2015). En effet, selon la théorie des systèmes dynamiques/complexes et l’émergentisme, le développement de la capacité de production de discours écrit peut être considéré comme un flux permanent, non linéaire, dépendant des changements introduits et susceptible d’arriver à des états de stabilité temporaires (cf. Herdina et Jessner, 2002 ; Jessner, 2006 ; Narcy-Combes, J.-P. et al., 2014).
Après avoir décrit la complexité du lien entre les aspects cognitifs et culturels de l’écriture, nous tourner vers les modélisations des processus qu’elle met en œuvre nous montrera la complexité des phénomènes qui l’accompagnent. Plusieurs modèles se sont succédé pour parvenir à rendre compte de cette complexité.
2. Modélisations du processus de production
2.1. Ecrire en LI
Les théories considérées comme les plus influentes pour l’enseignement de l’écriture en LI, d’après l’étude de Leggette et al. (2015), sont la théorie de traitement cognitif de l’écriture (Flower & Hayes, 1981), la théorie sociocognitive de l’écriture (Flower, 1994) et la théorie socioculturelle de l’écriture (Prior, 2006).
Pour Flower & Hayes (1981) l’écriture est un ensemble de processus cognitifs que le sujet écrivant orchestre et organise durant l’acte de composition. Les composants du processus sont hiérarchiques et peuvent s’emboîter l’un dans l’autre. Il s’agit donc d’un processus récursif au sens où le sujet écrivant avance, non pas de manière linéaire, mais par un retour, de temps à autre, à une étape antérieure quand il lui semble que son objectif n’est pas réalisé.
Cependant, ce modèle théorique ne prend pas en considération l’influence du contexte sur l’activité d’écriture. Plusieurs modèles de pratiques didactiques d’écriture (y compris pour les apprenants de LA) s’y sont appuyés, en reprenant l’idée de processus mais de manière souvent très linéaire : planifier, rédiger et réviser. Les étapes de la planification et du retour sur le texte ont été privilégiées dans les études aux dépens de l’explication des problèmes impliqués dans le processus de mise en texte et des facteurs susceptibles de contribuer à l’amélioration de la production écrite (Fayol, 2007).
L’activité d’écriture est non seulement le produit de l’action du scripteur, mais elle est aussi influencée par le contexte social qu’elle prend en considération, plus ou moins consciemment (Flower, 1994). Dans ce second modèle, de nouveaux processus cognitifs apparaissent : l’écriture est considérée comme (1) production de signification qui émerge de la négociation interne (le scripteur avec lui-même) et externe (le scripteur et la communauté référence-cible) ; et (2) comme processus dialogique où le scripteur s’entretient, non sans tension, avec la connaissance antérieure et présente, les normes du genre, les attentes des destinataires ou commanditaires de l’écrit, la sagesse individuelle et le savoir disciplinaire ou universel. Le modèle de production de textes de Deschênes (1988) se rapproche de la théorie sociocognitive de l’écriture en prenant en compte la situation d’interlocution, les structures de connaissances et les processus psychologiques. Il a l’avantage de relier l’activité d’écriture à celle de compréhension et de faire mieux comprendre le fonctionnement de la mémoire pour traiter l’information.
Le modèle théorique socioculturel de l’écriture de Prior (2006) repose largement sur le paradigme interdisciplinaire du socioculturalisme développé à partir des travaux de Vygotsky. La conception de l’écriture comme activité socioculturelle présuppose la référence, le partage et la construction de référentiels communs, de systèmes de valeurs partagés.
Les modèles de l’écriture conçus à partir des années 1980 pour la production écrite en LI ont inspiré des modèles qui décrivent la production en LA. Néanmoins, la recherche met en lumière des différences entre les deux situations d’écriture ayant des implications importantes sur la didactique de la production écrite (Bozhinova, 2016 : 61-62 ; 2017 : 49-50). Par exemple, selon Ollivier (2011 : 67), la compétence langagière limitée et les particularités socioculturelles des règles de production représentent des contraintes complémentaires à celles que rencontrent les scripteurs en L1, notamment « la possible difficulté de mobiliser les connaissances présentes en mémoire à long terme, les règles gouvernant la production de textes et les problèmes rhétoriques ». De cette manière, la charge cognitive augmente (Gaonac’h, 1990) étant donné que les scripteurs accordent plus de ressources au « contrôle local » qu’au « contrôle global » du texte (Hidden, 2013 : 35). Par conséquent, écrire en LA représente un processus de résolution de problèmes liés à des contraintes internes et externes.
2.2. Ecrire en LA
Le nombre de recherches conduites sur la production écrite en LA ne permet pas de synthétiser ces travaux, notamment en raison de la variété des approches méthodologiques que les auteurs ont utilisées, ainsi que des profils des scripteurs observés. D’où les « réelles difficultés à dégager une théorie cohérente et unifiante » (Barbier, 2003 : 13). Nous présenterons brièvement certains des modèles les plus connus dans la recherche francophone et anglophone avant de nous arrêter sur un modèle centré sur la nature bilingue du processus de composition et sur une modélisation récente qui prend en compte la production à l’aide d’outils numériques.
2.2.1. Modèles influents de la production écrite en LA
Un modèle de la production écrite en L2 qui sert toujours de référence en didactique est celui de Moirand (1979). Il met en avant les appartenances du scripteur à des groupes sociaux, le passé socioculturel et les représentations au sujet des lecteurs qui se reflètent sur sa production. Guidé par une intention de communication, le scripteur essaie de produire un effet chez le lecteur d’après l’image qu’il se construit de celui-ci. La production écrite étant une activité située dans un contexte extralinguistique, elle doit prendre en compte les paramètres principaux de ce contexte, notamment le sujet, le lieu et le moment.
Côté anglophone, O’Brien (2004) rappelle quatre modèles de la production écrite en L2 parmi les plus connus dans la recherche :
(1) Le modèle de Zimmerman (2000) est intéressant en ce qu’il identifie des sous-processus qui sont mis en œuvre lors du processus de formulation et met l’accent sur l’importance des tentatives de formulation qui génèrent des modifications du texte par le tri et l’évaluation de formulations alternatives.
(2) Chenoweth et Hayes (2001) montrent qu’à l’étape de mise en texte, si le scripteur a une compétence linguistique avancée, celle-ci lui permet d’extraire facilement les formes lexicales nécessaires, tout en faisant attention à l’application des règles de grammaire. Au contraire, en cas de compétence linguistique limitée, le sujet a besoin de plus de ressources cognitives pour la mobilisation du lexique. Les apprenants reprennent moins leur texte avec l’augmentation de leur expérience linguistique parce qu’ils écrivent sans avoir besoin de revenir fréquemment sur ce qu’ils ont déjà rédigé.
(3) Grabe et Kaplan (1996) sont parmi les premiers à proposer un modèle sociocognitif de l’écriture en tant que traitement langagier communicatif. Il s’appuie à la fois sur les conceptions sociolinguistiques de l’utilisation de la langue (contexte, situation, participants, cadre, tâche, texte, thème) et sur les éléments psycholinguistiques (objectifs internes, traitement verbal, traitement interne de l’output). Un des atouts de ce modèle est qu’il met en avant la variation de la production de différents groupes de scripteurs.
(4) Dans son modèle, Kern (2000) inclut des plans disponibles (available designs) sur un continuum qui comprend aux deux extrémités les ressources linguistiques (systèmes d’écriture, vocabulaire, grammaire et conventions de cohésion) et les ressources schématiques. La tâche du scripteur est facilitée si celui-ci est capable d’utiliser les plans disponibles en plusieurs langues. L’écriture est définie comme un ensemble de pratiques qui s’adaptent aux contextes plutôt que comme processus universels invariables. Ce modèle oriente l’enseignement de la LA vers des approches fondées sur les textes et rappelle la nécessité de tenir compte des biographies des apprenants et du contexte d’apprentissage.
2.2.2. Modélisation centrée sur la nature bilingue du processus de composition
Un des modèles élaborés à partir de celui de Flower et Hayes (1981) est celui du processus de composition en L2 de Wang et Wen (2002) qui insiste sur la nature bilingue et récursive de ces processus et sur les différences en fonction (1) du niveau de compétence des apprenants en LA, et (2) de la tâche d’écriture (texte narratif et argumentatif) (cf. Figure 1). Selon cette modélisation, l’environnement de la tâche est la seule composante qui exclut la LI (les consignes de la tâche et le texte produit).
Les processus de composition subdivisés en cinq étapes récursives (et non plus trois) impliquent les deux langues, la LI étant activée aux étapes de génération et d’organisation des idées, ainsi que de contrôle. Le recours à la LA domine aux étapes d’analyse de la tâche et de génération du texte. En outre, un continuum entre le mode de compositions bilingue et monolingue est observé avec l’amélioration du niveau de compétence en LA.
Dans la troisième composante du modèle, la mémoire à long terme, les connaissances du monde et les connaissances rhétoriques activées sont rattachées le plus fréquemment à la LI, tandis que les connaissances linguistiques, à la LA.
L’étape de génération du texte en LA semble demander le plus d’attention et la plus difficile car les apprenants y consacrent environ deux tiers du temps de composition (ibid. : 240). C’est donc à cette étape que nous pensons que (1) des outils d’aide à la rédaction et à la révision et (2) la rétroaction seraient les plus utiles.
Figure 1. Modèle descriptif du processus de composition en L2 de Wang et Wen (2002 : 242, en français dans Hidden, 2013 : 36).Le modèle de Wang et Wen a été élaboré à partir de protocoles verbaux recueillis auprès d’apprenants d’une LA distante (anglais LA étudiée par des apprenants chinois) et exclut le contexte social. Il a été testé dans un cadre de translanguaging qui implique des langues plus proches (anglais LA étudié par des apprenants suédois) dans une étude de Gunnarsson et al. (2015) à la base de données recueillies par questionnaire. La majorité des apprenants plurilingues y affirment penser uniquement en suédois lorsqu’ils écrivent en anglais LA. Les apprenants ayant le suédois comme LI disent penser en anglais (surtout à l’étape de la génération du texte) plus souvent que les apprenants ayant une autre LI ou des LI parallèles. Les LI différentes du suédois sont très rarement activées. Les auteurs expliquent le comportement langagier des scripteurs plurilingues par la théorie du mode langagier et de l’effet de langue de base (Grosjean, 2008) selon laquelle les locuteurs plurilingues activent différentes parties de leur répertoire en fonction du répertoire de leur(s) interlocuteur(s). Il est donc important de prendre en compte le destinataire de la production écrite et les facteurs qui influent sur l’activation des langues qui sont, d’après la recherche en acquisition de L3 : l’utilisation récente, le niveau de compétence, la proximité typologique entre les langues et le statut de L2. Un facteur important dans de nombreux contextes est celui du statut des langues et en particulier le rôle de la langue d’enseignement dans laquelle les apprenants ont développé « une littératie de style académique » plus que dans leur LI (ibid. : 17).
Les pratiques translangagières semblent donc être favorables au développement langagier non seulement en contexte d’éducation bilingue (par exemple, Cenoz et Gorter, 2011) mais aussi dans des milieux où une LA est introduite aux niveaux éducatifs supérieurs. Pour enseigner l’écrit en LA, il convient de considérer l’écriture en tant que pratique plurilingue et de ne pas exclure les autres langues sur lesquelles les apprenants s’appuient, particulièrement aux étapes de génération et d’organisation des idées qui précèdent la mise en texte (ibid. : 18).
La segmentation plus détaillée des processus de composition du modèle de Wang et Wen (2002) et la prise en compte des facteurs qui influent sur l’activation des langues dans un cadre de plurilinguisme/translanguaging (Gunnarsson et al., 2015) ont des implications didactiques et peuvent être intégrées dans un modèle didactique plus complexe.
2.2.3. Modélisation du processus de composition d’apprenants plurilingues à l’aide d’outils numériques
Les modèles existants nécessitent d’être ré-examinés afin de prendre en compte le plurilinguisme des scripteurs, ainsi que l’entrée du numérique dans la sphère professionnelle, éducative et personnelle qui a modifié la façon d’écrire depuis quelques décennies (Velay, 2018 : 55). Une modélisation du processus de composition qui va dans ce sens est proposée par Bozhinova (2018). Elle s’appuie sur les modèles psycholinguistiques du bi/plurilinguisme et se focalise sur l'activation des codes, sur leurs rôles en fonction de différents facteurs, ainsi que sur la réflexion métalinguistique (Williams et Hammarberg, 1998 ; Herdina et Jessner, 2002 ; Jessner, 2006). Une comparaison de données produites par des apprenants de français LA plurilingues se situant à trois niveaux de compétence est établie en analysant des vidéos enregistrées avec un logiciel de capture d'écran dynamique pour observer en temps réel la production écrite à l'aide d'outils numériques d’étudiants de LI différentes (bulgare, russe, ukrainien, albanais, macédonien, kazakh et mongol). Par conséquent, la modélisation intègre également le recours à des outils d'aide à la rédaction qui est absent des modèles précédents.
La figure 2 représente de manière schématique comment évoluent les dimensions de la production observées aux trois niveaux (la fréquence de l'activation des codes, du recours à des outils d'aide à la rédaction et des épisodes de réflexion métalinguistique aux trois niveaux). Au moins trois langues sont impliquées dans le processus : le français langue cible, l’anglais utilisé comme langue d’enseignement dans le cursus universitaire en question et la LI. Les mots « outil » et « individuelle » en majuscules indiquent que lors de la mise en texte en français, l'outil joue un rôle plus important au niveau A2, tandis que le travail individuel sans recours à des outils, au niveau B2.
Les enregistrements audio-visuels rendent compte de la rédaction du texte dans Word accompagnée de consultation d’outils et de ressources en ligne choisis par les scripteurs, ainsi que de leurs réflexions exprimées à haute voix. Le français est utilisé pour prononcer ce qu’ils sont en train d’écrire, tandis que l’anglais est préféré pour insérer des commentaires ou expliquer la formulation et les techniques mises en œuvre. Tout comme dans l’étude de Gunnarsson et al. (2015), l’anglais joue donc un rôle instrumental (Williams et Hammarberg, 1998) en raison de son statut de langue d’enseignement dans le contexte concerné. Les sujets adaptent leur comportement langagier en fonction de la situation qui, en l’occurrence, comprend non seulement la tâche de production en français mais aussi le destinataire des enregistrements.
L’analyse des données[4] révèle que les apprenants activent surtout l'anglais et parfois, leur(s) LI. La production aux niveaux A2 et B1 se situe plutôt du côté du mode trilingue, tandis que celle des étudiants de niveau B2 converge plus vers le mode monolingue, ce qui est conforme également aux observations de Wang et Wen (2002) citées plus haut. Cependant, les comportements des apprenants observés à chaque niveau rappellent que le développement n’est pas linéaire et que leurs pratiques peuvent varier comme l’illustrent les flèches sur la Figure 2.
La modélisation de l’évolution du processus de rédaction à l’aide d’outils prend en compte la fréquence de la mise en œuvre de cinq types de stratégies dégagées des données audio-visuelles. Ces stratégies sont classées en fonction des ressources cognitives mobilisées, en commençant par celles qui retiennent le moins l'attention :
- traduction simple (traduction de mots ou de constructions brèves mais aussi de phrases entières au niveau inférieur) ;
- vérification de l’orthographe et de la grammaire (par exemple, par clic droit dans Word et parfois, à l’aide de correcteurs en ligne et d’autres outils) ;
- vérification d’une hypothèse au sujet d’éléments lexicaux partiellement connus à l’aide d’un ou de plusieurs outils ;
- adaptation d’un item traduit à son contexte (transformation des pronoms, des articles, du temps verbal, ajout d’éléments, etc.) ;
- traduction en utilisant les options avancées des outils (recherche de traductions alternatives, par exemple de synonymes ou de reformulations ; segmentation des phrases ; traduction inverse du résultat ; croisement des outils, etc.). (Bozhinova, 2018 : § 55)
L’analyse de ces données permet de conclure que le processus de rédaction à l’aide d’outils et la qualité du texte écrit diffèrent de ce qui est observé lorsque les scripteurs n’utilisent aucune aide. En effet, d’après le modèle de Zimmermann (2000), l’évaluation des tentatives de formulation conduit souvent au tri de formulations alternatives, voire au choix d’une variante simplifiée et à la baisse de la qualité du texte (Barbier, 2003 ; Schaeffer-Lacroix, 2009). Par contre, la production des apprenants de LA à l’aide d’outils numériques devient plus complexe car ils mettent en œuvre des stratégies de réalisation et d’évaluation plutôt que d’évitement et de simplification. Le recours aux outils diffère cependant en fonction du niveau des scripteurs et des affordances de ces outils. Les débutants se servent plus souvent des outils permettant de traduire et de corriger rapidement, tandis que les apprenants des niveaux supérieurs préfèrent les options plus avancées des outils ou combinent plusieurs ressources. En outre, certains outils tendent à réduire la charge cognitive (traducteurs automatiques, dictionnaires bilingues, correcteurs) et d'autres, à l'augmenter (dictionnaires contextuels, fonctions complexes des traducteurs, moteurs de recherche), ce qui entraîne des erreurs même dans la production des apprenants du niveau supérieur (Bozhinova, 2018 : § 56-61).
Les cas d'activation de l'anglais LA1 qui joue également un rôle fournisseur (Williams et Hammarberg, 1998) sont observés le plus souvent dans des situations de résolution de problèmes en raison de la proximité lexicale qui facilite fréquemment la recherche de traductions plus ou moins appropriées.
La réflexion métalinguistique est moins active au niveau A2 à la différence des niveaux supérieurs. En effet, à partir du niveau B1, la majorité des étudiants semblent développer un système de contrôle souple qui leur permet de se servir à la fois de leurs propres ressources langagières et des aides à la rédaction. Les épisodes de réflexion métalinguistique sont les plus fréquentes chez les étudiants du niveau B2. La majorité des étudiants de tous les niveaux réfléchit également à l'organisation de son texte et en planifie les différentes parties. Cette phase est effectuée en anglais par tous (sauf un apprenant de niveau avancé qui travaille en français). Dans le modèle de Wang et Wen (2002), la LI est dominante à cette étape. Certains sont également très attentifs à prendre en compte le destinataire et la situation d'énonciation. Ils font donc preuve d'une sensibilité métadiscursive et métapragmatique que d'autres chercheurs ont observée chez les apprenants plurilingues (Cali, 2006 ; Jessner, 2006).
Le travail avec les outils en ligne s'avère propice au développement langagier, notamment lorsque les apprenants mettent en place des stratégies de réalisation et d'évaluation qui sont à l'origine de séquences potentiellement acquisitionnelles (SPA) observées normalement à l’oral (de Pietro et al., 1989). En effet, il se crée des situations d'apprentissage proches de celles qui caractérisent l'apprentissage en interaction. Certains étudiants réussissent à repérer et à évaluer l'adéquation des éléments recherchés dans leur contexte et à les adapter au nouveau co-texte. Ce type de travail assure également la répétition dans la mémoire de travail de mots ou de segments entiers (blocs lexicalisés), ce qui favorise l'automatisation des processus (Logan, 1988).
Par conséquent, le construit de SPA prend du sens également à l’écrit, notamment lorsque les apprenants interagissent avec des outils et des ressources numériques. Dans ce cas, les processus déclenchés ressemblent à ceux qui résultent de l’interaction avec un tuteur/enseignant, des pairs ou des locuteurs de la langue cible qui conduisent à la reprise des énoncés non conformes aux normes attendues d’après les indices fournis (Bozhinova et al., 2017 ; Bozhinova, 2017, 2018 ; Brudermann, 2013 : 6 ; Macqueen, 2012 : 178-179).
La figure 3 illustre notre hypothèse sur le déclenchement des SPA à l’écrit grâce au système d’accompagnement et des outils et ressources utilisés.
Figure 3. Déclenchement des SPA à l’écrit (d’après Terzieva Bozhinova, 2016 : 168).En vue de l’élaboration de dispositifs didactiques orientés vers le développement de la production écrite en LA, il convient de tenir compte des différentes sources de SPA possibles.
3. Vers une didactique de l’écrit en LA
Malgré les avancées concernant la description de l’écriture en LA, il semble difficile d’aborder la question de l’apprentissage et des techniques d’enseignement qui favorisent l’amélioration de la production écrite en LA, notamment en raison de la complexité des configurations liées à l’expérience et aux connaissances acquises par les apprenants et aux milieux éducatifs culturels différents (O’Brien, 2004 : 4).
Nous examinerons quelques principes issus de la didactique de l’écrit en LI, ainsi que les conceptions développées en didactique de LA avant de nous tourner vers une proposition d’organisation de l’enseignement/apprentissage qui s’appuie sur le plurilinguisme des apprenants, leurs pratiques translangagères (translanguaging), différentes formes d’interaction et l’utilisation du numérique.
3.1. Principes issus de la didactique de l’écrit en LI
L’enseignement/apprentissage de la production écrite en LA s’inspire souvent des conceptions développées pour la LI tout en étant inscrit dans une culture éducative différente. De plus, les apprenants de LA ont besoin d’un étayage plus ciblé que ceux de LI en particulier lors de l’étape de révision en raison des facteurs socio-cognitifs et du rôle de l’erreur dont l’effet est essentiel pour le développement de l’écriture en LA (Myles, 2002).
Les développements théoriques concernant l’écriture en didactique du français LI voient l’écriture comme un processus et contestent l’exclusive du texte fini en faveur des processus intermédiaires. Chabanne & Bucheton (2002) identifient des modèles où une forme d’alternance apparaît entre l’objet ou le sujet comme paradigmes structurants, avec dans l’ordre :
- le modèle de la rédaction, gouverné par le schème du texte repris/recréé ;
- le modèle de l’expression écrite, centré sur le sujet écrivant, acteur et objet du texte ;
- le modèle de la production écrite qui se focalise sur le texte, mais relègue le sujet au second plan au profit d’un destinataire virtuel qui définit la pratique sociale ;
- le modèle du « sujet écrivant » qui revient à une centration sur le scripteur en tant que négociateur du sens émergeant dans un écrit du fait de la rencontre d’une vision personnelle du monde et des connaissances acquises.
Dans la dernière conception, l’écriture est donc vue comme une activité située et distribuée. De produit, elle devient projet avec une valorisation des « écrits intermédiaires » (Chabanne et Bucheton, 2008) et une place clé pour les auto-évaluations. Pour Penloup (2006 : 90), l’écrit permet à l’apprenant d’« inventer son savoir » en s’appuyant sur le « déjà-là » et sur l’interaction avec des pairs. Le milieu scolaire est pris en considération et les écrits créatifs et personnels reconnus (Masseron, 1994 ; Reuter, 1996).
3.2. Didactique de l’écrit en (anglais) LA
Dans sa synthèse de la recherche sur les théories et pédagogies d’écriture développées dans le cadre de EFL/ESL (anglais langue étrangère/seconde), Hyland (2008 : 2) constate qu’il est utile d’examiner séparément les conceptions qui sous-tendent les approches et les techniques d’enseignement même si elles sont souvent utilisées conjointement dans la pratique.
Le premier modèle didactique qui envisage « writing » comme un nom et non comme un verbe est celui centré sur le texte. Il implique que le produit importe plus que le processus ou le sujet qui réalise l’acte d’écrire (id.). Dans cette perspective, écrire présuppose l’application de règles, essentiellement langagières. L’écriture vise à produire un texte selon des normes lexicales, grammaticales et syntaxiques de la LA. La méthodologie qu’a développée cette approche repose sur quatre phases :
- familiarisation avec le modèle de texte à écrire,
- écriture contrôlée avec manipulation de modèles fixes dans des exercices de substitution,
- écriture guidée où on imite des modèles en remplissant des textes lacunaires et en créant des phrases propres au genre étudié,
- écriture libre où les apprenants écrivent en suivant le patron étudié. (id.)
L’influence de Bakhtine (1952-1953/84) est bien visible dans les approches didactiques de l’écriture basées sur le genre. Il distingue entre la proposition (unité de la langue) et l’énoncé (unité d’interaction verbale) (ibid. : 277). L’étude des énoncés permettrait de mieux comprendre les unités plus petites qui sont les paragraphes et les phrases ainsi que de saisir les enjeux des textes, qui sont également extralinguistiques. C’est l’intention du scripteur qui, pour créer un effet sur le lecteur, détermine son choix au niveau de la structure et de la sélection des unités de la langue.
Bakhtine définit les genres comme « types relativement stables d’énoncés » qui opèrent dans une sphère particulière (ibid. : 265). Un énoncé stable appartient à un genre qui lui-même repose, absorbe et transforme un autre genre. Les manifestations des effets des théories des genres sur la didactique de l’écrit apparaissent aussi dans la prise en compte des structures de ces types.
Un exemple de dispositif didactique pour enseigner l’écriture en L2 selon le modèle basé sur la notion de genre de texte consiste à suivre un scénario en cinq étapes (cf. Figure 4).
Figure 4 : Scénario didactique d'écriture basé sur le concept de genre (d’après Hyland, 2008: 6).Dans le deuxième modèle qui est centré sur le scripteur, Hyland (2008 : 8) distingue deux approches (« expressivist » et « cognitivist »). On peut aussi rapprocher ce modèle de celui de l’expression écrite, car ce sont les composition theories influencées par les travaux de Murray (1968/1985) et d’Elbow (1973) qui l’ont influencé et lui ont donné une impulsion.
Murray (1968/1985) est l’un des premiers à accorder une place importante au processus de révision dans la production de textes. Il recommande d’intervenir au minimum pour permettre aux étudiants de trouver eux-mêmes de nouvelles versions à leurs textes. Pour Elbow (1973) le texte est la propriété de son écrivain. Ce dernier devrait être au centre de toute approche de l’écriture, ce qui conduit à un modèle d’écriture libre (freewriting) où le sujet écrit pendant quelques minutes sans prendre en considération les problèmes de langue, de genre ou un destinataire éventuel en s’appuyant sur deux processus qu’Elbow désigne métaphoriquement par growing et cooking. Lors de la première phase (niveau macrostructural), le scripteur ne fait attention qu’au flux des idées : son texte « grandit ». Le deuxième processus (microstructural), transforme le texte au niveau des phrases, car les idées, ayant mûri, s’expriment alors de manière plus appropriée. Pour un scripteur qui rédige un texte en LA, la phase 1 sera souvent translangagière et des outils permettront à la phase 2 de rejoindre les normes de cette langue (Bozhinova et al., 2017), ce qui est conforme aux processus identifiés dans le modèle de Wang et Wen (2002) plus haut.
D’autre part, l’approche de la psychologie cognitive mise en rapport avec l’intelligence artificielle décrit l’écriture comme un ensemble de processus organisés par la mémoire, une unité centrale de traitement (Central Processing Unit) et des programmes de résolution de problèmes. Le schéma qui représente le flux des processus illustre leur non linéarité (cf. Figure 5). Enseigner l’écriture selon un tel modèle centré sur le scripteur, signifie de voir la composition comme un acte de résolution de problèmes pour construire du sens plutôt que comme un acte de communication (Hyland, 2008 : 10).
Figure 5. Schéma du flux des processus de composition (d’après Hyland, 2008 : 10)
Le troisième modèle didactique est centré sur le lecteur et prend en considération les exigences de la réception (ibid. : 13). Il trouve ses origines dans les courants de l’esthétique de la réception autour de Jauss, Iser et Umberto Eco. D’après cette conception, ce qui définit le sens d’un texte, particulièrement littéraire, c’est le lecteur qui recrée à travers sa lecture un texte à la mesure de ses attentes. Pour l’enseignement de LA, ceci implique de développer des techniques d’anticipation pour rédiger un texte adapté aux attentes du lecteur. Pour les apprenants la difficulté principale dans cette approche est liée aux perceptions divergentes entre les cultures qui concernent l’organisation et la cohérence textuelle, ainsi que la pertinence des différents procédés rédactionnels.
Dans les modèles ci-dessus, la lecture et les ressources n'apparaissent pas, si ce n’est, dans une certaine mesure, dans le premier modèle centré sur le texte et les genres (voir 3.2.). Mais avec les technologies et la possibilité de manipuler des corpus, cela change comme nous allons le voir.
3.3. Réflexion sur le copier-coller
Des recherches ont montré que lors de la lecture, la mémorisation du contenu et du langage est favorisée par le simple surlignement des parties clés d’un texte (Eisele-Hendersen, 2000). Dès 1990, Gaonac’h (1990) soulignait qu’une attention trop grande portée aux processus de bas niveau avait un impact négatif sur le travail de haut niveau d’où résultait un manque de créativité et des difficultés langagières.
Dans les pratiques que nous avons mises en place, les outils numériques permettent d’importer un texte et d’en rédiger un condensé en copiant et collant les éléments les plus pertinents du texte originel (Narcy-Combes, 2005, expérience menée par J-Y Colas). Les textes lus servent de ressources (input) et la rédaction de condensés, en générant une production (output) compréhensible, assure la stabilisation de réseaux de production.
Nous avons déterminé trois niveaux de techniques puis évalué les résultats par des pré et post tests qui ont montré :
- des acquisitions mesurables, en syntaxe, lexique et au niveau de la créativité,
- des résultats rassurants accompagnés d’une modification des représentations.
La pertinence de ce mode de travail est confirmée par les théories sur l’acquisition des langues, s’appuyant sur une double forme de la production langagière (Narcy-Combes, 2005).
Depuis, nos expériences ont confirmé que l’écriture collaborative favorise une métacognition initialement informelle qui peut ensuite être formalisée (Bozhinova et al., 2017) et la prise de recul permet à l’apprenant de passer du copier-coller au copier créer (Aberchoum, 2020). Proposer des tâches centrées initialement sur le traitement intensif de corpus de référence avant de passer vers des tâches plus créatives fait évoluer les pratiques liées au copier-coller. Les apprenants sont sensibilisés progressivement aux normes de citation et de reformulation pour éviter les problèmes de plagiat. Ces résultats vont également dans le sens de la recherche qui a montré les avantages du travail avec les corpus et les concordanciers bien que ces études portent plus souvent sur les niveaux avancés (Boulton et Tyne, 2014 ; Schaeffer-Lacroix, 2014).
4. Enseigner et apprendre à écrire dans un cadre de translanguaging
4.1. Principes généraux
Partant des modèles qui décrivent le processus d'écriture en LA, nous nous interrogeons sur la façon d'intervenir aux différentes étapes du processus d'écriture en fonction des difficultés des apprenants. Des recherches-actions menées auprès de publics bi/plurilingues (Bozhinova et al., 2017 ; Bozhinova, 2017, 2018 ; Bussière 2013) ont fait ressortir que la conception des dispositifs centrés sur le développement de la production écrite en LA devrait s’appuyer (au moins) sur quatre principes didactiques, à savoir :
- articuler les activités de compréhension et de production écrite, en assurant le traitement cognitif de données langagières de quantité augmentée (Robinson 2007 ; Hidden 2013) ;
- encourager les deux modes de mémorisation et de production : par règles et par blocs lexicalisés (Logan, 1988 ; Narcy-Combes, 2005) ;
- assurer un étayage de la production écrite conforme au processus d’écriture récursive (Macqueen, 2012 ; Brudermann, 2013) ;
- utiliser des outils numériques qui permettent la collaboration et rendent accessibles des ressources variées dans les langues connues par les apprenants 2010 ; Ollivier, 2011 ; Boulton et Tyne, 2014).
La figure 6 illustre les conditions pour optimiser un dispositif qui vise le développement de la production écrite en LA. Au premier niveau, on voit les principes didactiques retenus de la recherche théorique qui ont guidé la recherche-action et au second, des points qui précisent leur effet observé dans l’expérimentation. Les éléments de cette configuration peuvent être enrichis et organisés de manière dynamique en fonction des contextes et des objectifs.
Figure 6. Conditions pour optimiser l’enseignement/apprentissage de la production écrite (PE) en LA.Il convient de relier l'étape de la planification et de l'organisation des idées, où l'activation des autres langues est plus fréquente, à la lecture et au travail sur les genres dans une perspective interculturelle. Aux étapes de mise en texte et de révision (qui semblent être les plus laborieuses pour les apprenants), le travail est centré sur l'utilisation d'outils et la collaboration sans exclure totalement les autres langues. Les outils numériques aident donc à la fois à organiser le travail et à prendre en charge une partie de l’entraînement. La réflexion métalinguistique est encouragée grâce à la rétroaction de l’enseignant-tuteur et l’étayage par les pairs ou d’autres locuteurs de la langue cible. La sensibilité aux règles facilite l’étape de la révision des textes, tandis que le fonctionnement par blocs lexicalisés semble diminuer la charge cognitive, favoriser les stratégies de réalisation et automatiser les schémas linguistiques.
Comme les apprenants ont déjà acquis l’écrit en LI sous des formes multiples, nous avons focalisé notre attention sur les effets de leur répertoire langagier pluriel. Les approches psycholinguistiques (Herdina & Jessner, 2002 ; Randall, 2007, entre autres) et la réflexion sur le translanguaging issue de Williams (2002) et Garcia (2009), nous ont conduits à postuler que le scripteur débute par une écriture en deux étapes qui semblent se succéder mais sont en fait de plus en plus imbriquées : (1) appui sur le déjà-là, sa pratique de l’écriture en LI, les matériaux dont il dispose, en particulier les codes de son répertoire, ainsi que sur d’autres supports ; (2) abandon progressif de tous ces supports. Il restera à déterminer la façon dont il utilisera les outils à sa disposition ou fera usage de l’intertextualité à partir de corpus mis à sa disposition.
4.2. Un scénario pédagogique
L’organisation décrite globalement au point 4.1 a été appliquée selon une approche par tâches souple qui offre des possibilités améliorées de traitement collaboratif de ressources et d’outils numériques à des fins d’entraînement (Bozhinova, 2019). Dans cette approche, la mise en œuvre de la production écrite en tant qu’activité langagière dépend de quatre composantes principales : (1) le contexte (intention, lieu, moment, etc.), (2) les interactions sociales, (3) les ressources internes (connaissances et compétences) et (4) les ressources externes humaines et non-humaines considérées comme complémentaires (personnes impliquées et différents outils et ressources) (Ollivier, 2007 : 37).
Figure 7. Scénario fondé sur l’approche par les tâches et la co-construction d’objets de savoir (Bozhinova, 2019 : 163).Le scénario pédagogique proposé représenté dans la Figure 7 est conçu pour des apprenants de français de spécialité dans le domaine des affaires européennes et de la politique internationale. L’objectif communicatif du parcours qui comprend des micro et des macro tâches consiste à rédiger un article pour décrire une situation urgente et présenter une campagne de sensibilisation et de mobilisation en développant et en appuyant les idées par des points et des exemples pertinents. Les objectifs linguistiques sont centrés sur l’acquisition du vocabulaire lié à la crise migratoire et aux actions de solidarité en Europe et à l’international au cours de la dernière décennie, ainsi que sur l’utilisation d’expressions du but, de l’obligation, de la nécessité et du gérondif. Les objectifs socio-culturels comprennent la sensibilisation aux conséquences des conflits dans différentes régions, aux procédures d’accueil des migrants et des réfugiés en Europe et en France et aux actions de l’UE et de l’ONU en matière de migration. (ibid. : 163-164).
Le travail sur les tâches se déroule en trois étapes dont la première vise à introduire le sujet à l’aide de documents liés au sujet en prenant comme point de départ les connaissances et l’expérience des apprenants. À l’étape préliminaire sont présentés également les objectifs et la production finale qui sera réalisée. Des tâches de sensibilisation et d’entraînement sont ensuite proposées pour comprendre et discuter le contenu de textes-ressources en analysant l’emploi du lexique et des structures textuelles macro et micro dans leur contexte. Des outils disponibles en ligne aident à traiter les corpus et à s’entraîner sur différents points langagiers. Orienté par la macro tâche, ce travail se poursuit par la rédaction d’un article par groupes de manière collaborative dans l’espace numérique de travail en recevant également des conseils de l’enseignant pour améliorer les textes et utiliser des outils et des ressources appropriées. (ibid. : 164-170).
Bien que ce scénario se rapporte à une formation en langue de spécialité, la démarche générale suivie peut s’appliquer dans d’autres contextes d'enseignement/apprentissage ayant pour objectif de développer la production écrite en LA.
Conclusion
Dans cet article nous avons suivi l’évolution des théorisations sur l’écrit, initialement en LI, puis en LA en montrant comment le bilinguisme ou le plurilinguisme des scripteurs a été progressivement pris en compte. Enfin, l’apport des outils numériques a ouvert la voie à des conceptions plus complexes à modéliser. Cela nous conduit à proposer une modélisation de l’apprentissage et à suggérer quelques pistes de pratiques. D’une approche linéaire, la réflexion nous a conduits à la description de processus complexes avec de nombreux jeux de rétroactivité et d’actions simultanées (Hyland, 2008) dont la complexité est bien plus grande que ce que la figure 6 tente de présenter. Au-delà de la reconnaissance du plurilinguisme et de la complexité de l’écriture, ce que nous proposons prend en compte le fait que la connaissance est distribuée entre les humains et les artifacts cognitifs qu'ils ont créés et ne décrit pas que les opérations cognitives que l'individu effectue en interne.
Dans l’enseignement-apprentissage de LA, apprendre à écrire est conçu soit comme un simple apprentissage de l’écriture (learning-to-write) afin de développer une (multi)littératie pour répondre à des besoins d’ordre personnel, social, académique ou professionnel, soit comme écrire pour apprendre (writing-to-learn) du contenu disciplinaire et développer la LA (Manchón, 2018 : 258). Les recherches centrées sur l’écriture pour apprendre une LA (writing-to-learn language, WLL) soulignent que son apprentissage et les différentes formes de rétroaction (feedback) pour le développement langagier favorisent une mise en place plus personnelle et autonome de la métacognition (id.). Le translanguaging est transposé également dans les apprentissages institutionnels, par exemple dans l’approche Focus on Multilingualism (Cenoz et Gorter, 2011) ou nos propres recherches.
Ces recherches nous permettent d’avancer qu’une des pistes possibles pour faciliter l’enseignement/apprentissage global et systématique de la production écrite dès le niveau débutant est liée à l’articulation des activités de lecture et d’écriture. Pour aller au-delà des structures de surface, il convient de choisir les textes supports en fonction de leurs caractéristiques typologiques pour qu’ils servent d’embrayeurs ou de modèles. Il est donc possible que des supports plurilingues permettent de réactiver des connaissances antérieures et de repérer les ressemblances et les différences au niveau typologique des textes. Ces ressources peuvent servir également à repérer les instances (blocs lexicalisés) qui ont une fonction pragmatique dans un discours donné. D’autant que, comme la mémoire de travail est limitée, la charge cognitive pourrait être diminuée si les processus ascendants sont facilités en insistant sur le traitement de blocs dont la longueur augmente (Randall 2007), c’est ce que favorise l’emploi du copier-coller. D’autre part, l’organisation de l’apprentissage autour du travail sur « un authentique contenu, disciplinaire, scientifique, littéraire, artistique ou autre » est favorable à la performance en L2 et peut accélérer le processus d’apprentissage de la langue (Narcy-Combes, 2005 : 55). Toutefois, nous croyons que la présentation de ressources ne suffira pas, puisque, comme l’affirment Crinon et Marin (2010 : 86) : apprendre à écrire ne se résume pas à acquérir une somme de savoirs techniques – linguistiques et rhétoriques –, mais consiste aussi à s’insérer dans un réseau d’interactions diverses, à définir des intentions et à anticiper les réactions de futurs lecteurs, à utiliser les textes qu’on a lus, à exercer une activité critique sur les textes des autres, ce qui implique que les apprenants ont besoin de savoir que leurs écrits ne seront pas de simples tâches scolaires, mais qu’ils seront lus dans des contextes spécifiques où ils rempliront une fonction sociale prédéfinie.
Il est nécessaire que les ressources soient complétées par la discussion et la négociation avec les pairs à des moments spécialement conçus au sein du dispositif d’apprentissage, d’un feedback de la part de l’enseignant, des tuteurs et par les pairs dans les temps de collaboration et d’un retour une fois que l’écrit a atteint son public de destinataires.
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[1] Cet article est écrit en hommage à notre collègue et doctorant qui est parti trop tôt. Une partie de cet article s’est appuyée sur les données qu’il avait rassemblées.
[2] Nous avons choisi de suivre les propositions du Douglas Fir Group (2016) et d’employer les termes langues initiales (LI) pour les langues de première socialisation d’un individu et langues additionnelles (LA) pour les autres, quelles que soient les circonstances de leur apprentissage.[3] Il s’agit de situations dans lesquelles la LI est valorisée et continue à se développer sans être affectée ou supplantée par l’apprentissage d’une LA.
[4] Voir Bozhinova (2018 : § 34) pour une présentation détaillée concernant le codage et l’analyse des données.