Introduction
Indépendamment des querelles qui invariablement agitent le monde éducatif à chaque fois qu’émerge une autre façon de penser ce qui semble juste et ce qui se doit de constituer de nouvelles orientations épistémologiques et ou méthodologiques, il semble que les discours et particulièrement ceux qui touchent à l’enseignement des langues sont marqués de nos jours par la force avec laquelle ils prônent l’adaptation et affichent la certitude de maîtrise du processus apprendre. Une sorte d’énoncé sous-jacent vise à pénétrer les consciences et à persuader que les temps ont changé, et que dans un monde considéré en continuel bouleversement chaque individu se doit d’être apte à s’adapter dans l’immédiateté. Cette injonction est elle-même corrélée à la mise en avant d’une croyance en la certitude que désormais ce qui touche au néotène peut être maîtrisé. Cette position, à notre avis, participe à la fois d’une réponse aux options économiques dominantes, qui se traduisent par une marchandisation à outrance de la sphère de l’humain et que l’on peut comprendre dans le sens qu’assignent Michéa1 (2007) et Dardot et Laval2 (2016) au néo-libéralisme, sans que ceci ne soit revendiqué ou affiché ; et d’autre part participe d’une occultation manifeste des analyses qui se proposent d’observer les mutations, dans nos sociétés occidentales, d’un monde marqué par la mort du sujet.
L’opposition la plus flagrante entre la conception des cognitivistes et la conception qui prend source chez Saussure réside dans le fait que la première se fonde sur l’idée que la langue représente le réel comme s’il s’agissait d’un étiquetage de la réalité. Les langues réduites à n’être que des langues de service3 (Judet de la Combe et Wismann, 2004 : 48) ne sont plus que des codes qui servent à placer des étiquettes sur le monde (Prieur, 2017). Nous nous trouvons placés, comme le souligne Dufour4 (2007 : 226), face à « un pragmatisme techniciste de la nomenclature qui exige une langue pleine et uniquement référentielle ».
Si l’on suit les instructions du Ministère de l’Éducation Nationale dans son décret n° 2015-372 du 31 mars 2015 (J.O. du 2 avril 2015), dans son article D. 122-1, il n’y a plus de langue mais des langages5 , je cite : « Les langages pour penser et communiquer, des langages scientifiques, des langages informatiques et des médias ainsi que des langages des arts et du corps ».
Avec les approches communicatives ou actionnelles, selon certains on se serait affranchi des conceptions archaïques et instrumentales du langage en oubliant précisément que c’est la langue elle-même de nos jours qui a disparu. Les tendances aujourd’hui dominantes assignent à l’exercice de la parole une configuration particulière : parler ce serait bien transmettre de l’information, avec l’idée sous-jacente qu’il y aurait « un bien dire », une forme adéquate, de façon à ce que la réalité soit bien ordonnée. Il y a dans la parole, la capacité essentielle de faire et de pouvoir accéder pour chacun de nous à la fonction symbolique. Les Grecs, du fait du langage, considéraient que nous vivons dans un monde halluciné. Parler, en quelque sorte, c’est s’illusionner, c’est ce que les Grecs nommaient fantaisie ; parler c’est transmettre des croyances, des noms propres, des généalogies, des obligations, des rapports sociaux et avant tout la parole elle-même. Nous entendons des sons et nous en inférons des situations que nous pouvons nous représenter. Les sons agencés en séquence soutiennent toute une imagerie mentale et la représentation sonore s’agence en récit. La parole, c’est ce que Lacan nomme la parole évocante. Lacan nous rappelle qu’avant de communiquer, la parole est évocation6, il dit : « Car la fonction du langage n’y est pas d’informer, mais d’évoquer. Ce que je cherche dans la parole c’est la réponse de l’autre. Ce qui me constitue comme sujet c’est ma question. » (1966 : 299).
On peut rapprocher ce que dit Lacan de ce que dit Benveniste7 dans les Problèmes de linguistique générale : « C’est dans et par le langage que l’homme se constitue comme sujet ; parce que le langage seul fonde en réalité, dans sa réalité qui est celle de l’être, le concept d’''ego''. » (1966 : 259).
La communication humaine, dit Lesourd8 (2006 : 96) n’est pas un échange égalitaire entre deux individus, mais bien un discours dans lequel le sujet parle à un autre qu’il construit seul, même si cet autre peut s’incarner dans un semblable.
L’humain, en sa qualité de néotène9, est sous-tendu par une théorie du sujet qui fonde le parlêtre, en tant que sujet clivé10, et qui conçoit ce dernier comme affecté de la parole11. Le sujet, du fait de parler, n’est jamais un sujet plein, mais un sujet toujours divisé par le langage et c’est ce qui marquera son inconscient.
A quoi sert le langage, se demande Lacan, s’il n’est ni fait pour signifier les choses expressément, je veux dire que c’est pas du tout sa première destination, et la communication non plus ? Eh bien c’est simple, c’est simple et c’est capital : il fait le sujet. Ça suffit bougrement. Parce qu’autrement, je vous le demande, comment vous pouvez justifier l’existence au monde de ce qu’on appelle le sujet.12 (Lebrun, 2006 : 201)
Dire que le sujet se pose dans le monde par la parole, signifie que l’ordre symbolique ne peut plus être pensé comme production ou manifestation de la conscience. Deux manques se recouvrent : le premier est un trou dans le réel par le symbolique, une perte qui installe le rien. Le second manque est celui inscrit au champ de l’Autre. Il faut une perte pour que se mette en place le langage. Si nous sommes des êtres parlants, c’est bien parce que nous avons payé notre tribut au négatif.
Poser la question du désir nécessite de se replacer du côté d’un sujet13 divisé. Le sujet n’existe que comme effet en retour de la parole qui le constitue dans un univers symbolique de discours et d’institutions dont il n’a pas la maîtrise. Ce détour pour dire que nous ne sommes pas le sujet plein, le sujet maître de son dire. Ce qui signifie que l’on ne peut pas dissocier dans le parlêtre ce qu’il en est de la cognition de ce qu’il en est des affects.
Si, du côté de la DLE, l’exercice de la langue est placé dans le registre du faire, il correspond en cela à l’une des caractéristiques de la pédagogie post-moderne épinglée par Arendt14 (1972 : 234-235) à savoir : l’affirmation de l’autonomie, la promotion d’un savoir enseigner sans référence à la matière enseignée, la substitution du faire à l’apprendre. Le terme « apprenant » a ceci de particulier qu’il apparaît dans un vaste débat à la fin du XIXe siècle qui oppose Humboldt15 à Diesterweg16 et qui porte sur l’école. Le débat est vif entre ceux qui proposaient la centration sur l’élève et ceux qui voulaient une école centrée sur le savoir. On assiste de nos jours à une dévalorisation de la parole et à une valorisation excessive des outils techniques. Le culte de la maîtrise est omniprésent, et le plus troublant est qu’il n’est plus question d’un rapport au savoir mais bien plutôt d’une réduction à des formes de savoirs qu’il conviendrait d’acquérir ou même de choisir d’acquérir soi-même.
Le processus d’apprentissage en vient à n’être qu’une manipulation d’objets, mais cette manipulation d’objets est elle-même corrélée à la place dévolue aux acteurs de la relation éducative. L’enseignant désormais accompagnateur fait face à l’apprenant-expert autonome. Dans le monde d’hier perdurait un modèle de la transmission du savoir alors que progressivement nous sommes passés dans un monde dans lequel les enseignants sont devenus des accompagnateurs de savoirs. C’est ce que Gauchet, Blais et Ottavi17 ont nommé passage d’une société de tradition à une société de connaissances. L’enseignant ne met plus en signes, ne fait plus signe (Augustin18). La relation n’est plus d’un sujet à un sujet mais une relation outils-moyens-sujet. On fait croire, en amalgamant des éléments disparates, qu’apprendre ne serait qu’une question de procédures. Il y a bien une subversion de la relation enseignant/ enseigné en ce sens que ce sont les moyens et outils qui deviennent prépondérants. L’enseignant accompagne et s’efface, et l’insistance est mise non plus sur la matière à enseigner, mais sur les moyens qui doivent permettre de résoudre des tâches. Prieur19 nous dit : « le CECR est un discours sans parole, un discours technique anonyme, impersonnel fondé à l’instar de la communication-action qu’il promeut sur l’effacement de toute énonciation. ».
L’omniprésence de notions provenant du marketing, l’omniprésence de la notion de compétence déclinée sous différentes formes ou l’obsession de l’évaluation à ce titre peuvent être considérées comme symptômes de l’illusion centrée autour de l’agir. Dans le processus, qui concerne celui ou celle qui apprend, il y a un acte qui le ou la concerne seul, mais il y a surtout quelque chose qui va concerner l’être même du sujet dans la mesure où le processus engagé va modifier le rapport de ce sujet à cet objet de savoir qu’il va faire sien. Kant20 (1776) plaçait l’acte de croire au fondement du processus apprendre et c’est ce que Lacan21 (1966, 1975) formule dans l’expression d’un sujet supposé savoir. Il y a donc un double mouvement, d’une part un sujet supposé savoir, et d'autre part un sujet supposé croire. Wittgenstein, dans De la certitude, le formule en ces termes : « L’élève croit ses maîtres et ses livres d’école22. » Tout ceci pour dire qu’il est nécessaire d’y adjoindre ce que souligne Cifali23 : « Toute transmission de savoir se soutient d’une relation entre êtres humains. ».
Sans entrer plus avant dans ce que nous livre Wittgenstein, ceci nous force à considérer que l’on n’apprend pas seul, bien que de nos jours, on cherche à nous persuader du contraire. L’enseignant est dépositaire de la croyance déposée, mais l’acte lui même suppose pour le sujet un deuxième mouvement qui est celui d’oser. Oser par soi même, c’est-à-dire échapper à toute forme de tutelle avec pour but ultime d'être libre. La croyance déposée en l’autre est à rapprocher de la relation transférentielle que Freud pointe dans l’économique de l’amour ou pulsion épistémophilique. La croyance déposée en l’(A)autre réside dans le fait qu’on suppose en l’autre une sorte d’agalma. L’agalma chez les Grecs, c’est l’objet dont on se pare ou dont on s’enorgueillit. C’est à la fois objet d’échange et de transmission. L’agalma c’est ce qui vaut par l’échange. Pendant longtemps on a considéré qu’il était essentiel d’amener des élèves là où précisément ils n’iraient pas d’eux-mêmes, de façon à ce qu’ils se posent des questions qui à première vue ne les concernent pas. Ainsi de les conduire là où ils n’iraient pas de leur plein gré. Il y a nécessairement une dualité, l’a(A)utre reçoit cette croyance déposée en lui et ce mouvement fonde le processus qui fait que quelque chose vient d’un ailleurs. Ailleurs qui peut s’entendre par le simple fait que les protagonistes proviennent de générations différentes mais qui se fonde sur le pacte de la parole échangée.
De fait, nous nous trouvons confrontés à une éradication à la fois du savoir et du sujet en faisant en sorte de rabattre toute question sur le mode de l’avoir pour ne pas affronter la question de l’être. Lorsqu’on considère qu’apprendre une langue c’est satisfaire un besoin, si l’on parle de désir de langue, on assimile ce désir au vœu, au souhait, à l’aspiration, mais aucunement au désir proprement dit.
Dans son ouvrage Le désir et le monde, Barbaras24 remarque que :
On finit par nommer désir tout mouvement qui nous porte vers quelque chose, quelle que soit la nature de ce mouvement et quoi qu’il en soit du statut de cette chose. Le désir recouvre aussi bien le besoin (je désire boire), la volonté (je désire travailler), le souhait (je désire qu’il revienne), que l’aspiration (je désire changer de vie). Ce qui est frappant dans ces nombreux usages, c’est que le désir proprement dit en est absent, ce qui s’atteste par le fait qu’il peut toujours être spécifié par ou comme autre chose (aspiration, rêve, volonté, etc.). (…) En revanche, les choses changent du tout au tout lorsqu’on parle du désir tout court, du désir qui n’est plus de ceci ou cela, du désir comme tel. (Barbaras, 2016 : 8)
et il ajoute : « Tout le monde comprend, au moins de prime abord, de quoi il s’agit : le désir désigne ce mouvement singulier et impérieux qui me porte vers un autre. »
Avec la compétence, la motivation est le refrain qui revient à la fois dans le monde du travail et dans le secteur éducatif. Elle est donnée comme allant de soi et s’il y a un problème, le remède est à chercher de son côté. La motivation25 (Anderson, à paraître) est le principe explicatif général et l’onction magique qui permettra de résoudre les problèmes. Chez les managers et les DRH, la motivation provient de l’ouvrage de Maslow26 publié aux Etats-Unis en 1943, et généralement complété avec les facteurs d’ambiance et d’hygiène développées par Herzberg27 ; et on peut y adjoindre la notion de savoir être28 (Bellier, 2004). Aussi va-t-il de soi qu’ajouter le désir dans son acception courante ou le configurer en impulsion à apprendre et motivation reviendrait à expliquer le feu par la vertu phlogistique.
Goldschmidt29 remarque que « Toute langue est reconnue comme telle, c’est-à-dire ''comme voulant dire quelque chose'', comme ''signifiant'', elle est donc quelque chose que je pourrais ''comprendre'' si je la ''savais'' » (1996 : 19). Et l’on sait bien qu’on a la capacité d’apprendre une langue mais que l’une attire et l’autre repousse, ce qui veut dire que la question ne se situe pas du côté de la langue mais bien du côté du sujet. Poser la question d’un désir de langue de fait occulte la question du désir. Entrer, passer dans une langue étrangère, suppose non pas essentiellement des besoins ou une demande mais véritablement un désir30 (Lacan, 1969 : 98).
Il y a quelque part une vérité, nous dit Lacan, une vérité qui ne sait pas et c’est celle qui s’articule au niveau de l’inconscient. C’est là que nous devons trouver la vérité sur le savoir.
L’appétit d’apprendre, de savoir est en étroite dépendance du savoir inconscient qui en est le ressort secret.31 (Vincent : 2002 :13)
Pour Hegel32 (1807), l’existence humaine se fonde sur la relation à autrui, se nourrit d’échanges, de relations, de communications, mais le désir de l’homme trouve son sens dans le désir de l’autre, non pas parce que l’autre détient les clefs de l’objet désiré, mais parce que sous ces objets, c’est le désir d’être reconnu par l’autre. Je désire parce qu’il me manque quelque chose.
Le désir est constitutif de la conscience de soi du sujet lui-même, non pas de façon immédiate, mais en ce qu’il porte sur un autre désir qui porte sur le même objet, un objet non naturel, sur quelque chose qui dépasse la réalité donnée, c’est-à-dire sur le désir lui-même. Le désir n’est rien de nommable. Le sujet du désir qu’il s’agit de reconnaître n’est pas un moi substantialiste. Désirer le désir de l’autre signifie que le désir se désire lui-même, jamais identique à lui-même, toujours au-delà de lui-même, et c’est là qu’intervient le langage : il a une fonction essentielle, il est la manifestation du sujet qui se pose en niant le réel et du coup opère le prodige, dit Kojève33 (1947), de faire être ce qui n’est pas. Dans son ouvrage De Magistro : le discours du maître en question, Paturet retrace le cheminement à partir d’Hegel, de Kojève sur la question du désir et le sens que lui assigne Lacan34 (1958-1959) : « Lacan donne au désir un sens différent : celui de faille, de béance et de manque comme achoppement d’une satisfaction intégrale impossible. » (Paturet35, 1997 : 98).
Le désir de l’homme est le désir de l’Autre, dit Lacan36 (1966 : 814). Désirer le désir de l’autre signifie que le désir se désire lui même, jamais identique à lui même, toujours au delà de lui.
On peut constater par là que lorsqu’on lit Alexakis, Beckett, Cheng, Canetti, Goldschmidt, Ionesco, ou Mizubayashi37 (2011), qui ont retracé leur entrée dans la langue française, on se dit qu’ils auraient été bien incapables de satisfaire aux injonctions et directives que nous avons de nos jours. Mizubayashi nous dit exactement le contraire de ce que prônent les options majoritairement développées. D’abord l’opposition à la langue qu’il se devait d’apprendre au lycée (l’anglais) qui n'est pour lui, écrit-il, « qu’un déchiffrement sans goût, sans passion, sans amour38 », en opposition au français, objet fantasmatique, qui va prendre consistance à partir de sa réalisation musicale et de la séduction qui s’opère par le truchement d’une voix féminine, qui incarne l’idéal d’une femme qui aurait les traits de Suzanne, personnage de l’opéra de Mozart. Ce que nous montre Mizubayashi, c’est que l’advenue du français est rendue possible à partir d’une orientation du français comme objet du désir, objet d’amour qui prend la forme de vouloir lire les écrits de Rousseau et qui s’incarne dans une voix féminine. Les Noces de Figaro constituent la résolution et l’investissement dans l’apprentissage du français et, non dupe, il le souligne : « Me croira-t-on si je dis que mon amour du français a été nourri par celui que je portais et porte toujours au musicien salzbourgeois. » (2011 : 61). Il est évident que nous sommes loin de la doxa de la didactique car prendre en compte le sujet dans ce que la psychanalyse nous enseigne, cela suppose de reconnaître la responsabilité de celui ou celle qui apprend à partir de la position qui est la sienne face au savoir. La psychanalyse nous enseigne que le savoir nous vient toujours de l’Autre. On peut considérer que l’ignorance consciente d’elle-même est constructive et stimulante, et que c’est le savoir préalable qui est un obstacle qui barre le chemin de la connaissance. Le maître socratique, en faisant le deuil du savoir, fait le choix de ne pas enseigner, il amène son interlocuteur à faire rupture avec ses opinions, ses croyances, puis à reconstruire pour lui même sa propre conception d’une possible problématisation du savoir. Popper disait que l’ignorance est absence, c’est qu’elle ne peut se définir que par la négation de ce dont elle est l’absence. Elle ne peut se comprendre qu’en référence au savoir qui lui manque. On ne peut pas chercher ce qu’on ne connaît pas puisqu’on ne sait pas ce que l’on cherche.
Apprendre, ce n’est pas passer de l’impossible ignorance absolue au savoir intégral. C’est par la négation que l’affirmation prend corps. Dire « je ne sais pas », c’est déjà savoir quelque chose, cela préluderait à l’activité de penser. De fait savoir et non savoir sont tissés ensemble. C’est ce point d’impossible qui ouvre à la connaissance. L’intérêt de la négation, que l’on retrouve dans l’accès au langage, permet une symbolisation du réel. La confrontation à l’impossible, au réel fait naître la pensée par la mise en jeu d’une fonction logique symbolique. Cette fonction logique symbolique vient délimiter le réel par une mise en jeu de la négation.
La question est d’ouvrir une brèche, créer un manque, une véritable ignorance, un espace d’altérité pour le sujet afin qu’il puisse y déployer son désir, condition de possibilité de l’apprendre. Apprendre ne réside pas dans une simple demande de connaissances, mais dans une adresse, quelque chose adressé à un autre. Cette demande est formulée sur un mode qui lui est propre, elle contient la demande de donner vie au savoir. En ce sens l’enseignant est celui qui accepte pour d’autres d’être représentant du savoir. La production du sens passe par la stratégie discursive du maître, elle s’inscrit dans le champ de la parole. Le vrai ne s’élabore pas dans l’absence de l’autre mais dans l’intersubjectivité.
La question est donc : de quelle manière le désir du pédagogue suscite le savoir pour les autres. Dire cela, c’est dire que cela ne provient pas du savoir lui-même, mais de ce qui est supposé du représentant du savoir. Le savoir n’intervient qu’en position médiatisée et selon la place d’où il est évoqué, la fonction du savoir ne peut être suscitée que là où le désir de l’enseignant croise le désir de l’élève.
La parole est celle qui donne sens, non qui écrase mais qui dévoile, qui trace un chemin vers ce que l’on ignore. Alors la parole déplace, elle implique qu’il y a une implication subjective et c’est dans ce sens qu’apprendre c’est toujours apprendre de quelqu’un pour transmettre à quelqu’un d’autre. Ce qui signifie que la parole est don de ce qui a été appris, qui se transmet dans un échange de pensées.
Apprendre une langue étrangère fonde une demande qui provoque une rencontre mais cette demande croise le désir du sujet. La question du passage d’une langue à une autre, touche fondamentalement à la relation qui s’établit entre le sujet et la langue. Comment l’autre langue peut-elle devenir une vraie langue, c’est-à-dire une langue dans laquelle il est possible de nommer. La langue est objet d’amour parce qu’elle est un objet libidinal de la relation archaïque qui s’est établie entre la mère et l’enfant. D’une certaine façon, apprendre une langue étrangère vient provoquer des perturbations dans la langue d’accès au langage et de ce fait le rapport à cette première langue se trouve remis en jeu dans un jeu de similitude et d’écarts. La langue étrangère permet un détour vers des phonèmes étrangers où l’amour et la haine ne sont pas marqués.
Pour revenir à la didactique des langues, on peut retenir qu’au fond on ne sait pas ce qui pousse véritablement un sujet vers une langue, qui n’est pas celle de son accès au langage. Mais, et c’est un point important, il peut exister quelque chose qui fasse que cette langue autre devienne objet de désir pour un sujet. Devant le paysage assez sombre que nous livrent les tendances dominantes de la DLE, on voit bien que sont oubliés les acteurs qui participent à l’acte éducatif, mais qu’il est toujours réconfortant de se dire qu’on ne peut pas empêcher le sujet qui a le désir d’apprendre et qu’il est nécessaire de relativiser ce qui provient de la pédagogie ou de la didactique, car comme le formulait Leibniz39 : « la pédagogie peut tout puisqu’elle fait danser les ours ».
La question consiste donc à se demander comment redonner place à ce qui manque, c’est-à-dire comment redonner place à un sujet autre que tel que configuré en tant que simple acteur social. Serait bien malin celui qui dirait pourquoi on apprend telle ou telle langue.
Une première orientation pourrait consister à entendre ce que peut recouvrir la nature du « faire » dans l’acte éducatif. Arendt40 (1961 : 187-230), dans La condition de l’homme moderne, reprenait la distinction d’Aristote entre praxis et poïesis. L’œuvre ou poïesis est une activité de fabrication en vue de produire un ergon, une œuvre particulière. Le faire représente un moyen en vue d’une fin qui lui demeure extérieure et la manière correspondant au comportement de fabrication ou de production est la techné, le savoir faire. La poïesis, fabrication d’une œuvre, a pour caractéristique d’être extérieure à l’agent producteur. Le faire poïetique est atteint lorsque l’œuvre est finie.
Au contraire, la praxis n’a d’autre fin qu’elle-même, elle est l’usage et l’exercice de l’action mais demeure toute entière dans le sujet. La manière d’être de la praxis réside dans la phronésis, sagesse pratique. Castoriadis écrivait que la vraie médecine, la vraie politique, la vraie pédagogie – pour autant qu’elles aient existé – appartiennent à la praxis. La praxis étant entendue comme un art de faire. Elle n’obéit pas à une logique hypothético-déductive, elle est l’intelligence de l’instant, de la singularité, de la complexité. La praxis n’a d’autre fin qu’elle-même, elle est l’usage et l’exercice même de l’action, d’où il résulte un perfectionnement de l’agent et non un ergon qui lui serait extérieur. Elle ne s’épuise pas dans la production, elle demeure dans le sujet et dure aussi longtemps que lui. Dans la praxis, la fin n’est pas poursuivie pour elle même, elle réside dans l’activité elle-même.
Dans la relation qui se noue entre des acteurs engagés dans une histoire, des sujets singuliers sont concernés, non pas dans la recherche d’une maîtrise du sens ou d’une totalisation de savoir, mais sur l’imprévisibilité d’une rencontre. Pour qu’un objet de savoir puisse devenir objet d’enseignement, il faut qu’il apparaisse comme nouveau. Il opère une ouverture dans l’univers des connaissances déjà exploré. C’est ce que Freud41 (1914 : 227-232) souligne dans le petit texte intitulé « Sur la psychologie du lycéen ».
Une deuxième orientation porterait sur le rapport singulier que peut entretenir un sujet confronté (ou placé) devant une langue qu’il ne connaît pas. Dans un article publié dans La clinique lacanienne, Prasse42 (2000 : 197) retrace la rencontre réussie avec une langue étrangère d’un jeune artisan allemand arrivant à Amsterdam s’adressant en allemand à divers interlocuteurs qui lui répondent à chaque fois : « Kannitverstan » (« comprends pas » en néerlandais). A chaque fois qu’il pose une question, il obtient la même réponse « kannitverstan », mais pour lui M. Kanniverstan est le propriétaire d’une belle maison il possède des bateaux et a un somptueux cortège funèbre. Prasse, de langue allemande, relie son entrée dans le français par le truchement de l’italien (opposition entre la langue apprise par contrainte et la langue apprise avec plaisir), mais l’article porte sur ce qu’il en est de la fonction subjective dans le langage et ce qui nous intéresse, c’est l’hypothèse qu’elle formule à la fin de l’article. Elle écrit :
J’avance donc cette hypothèse : le désir pour les langues étrangères, le désir d’apprendre, de savoir parler une autre langue, se nourrit de deux sources apparentes qui, au fond, ne sont qu’une seule : envie des biens et de la façon dont jouissent les autres, et inquiétude pour un désordre, inquiétude de ne pas être à la place qu’il faut, de ne pas pouvoir trouver sa propre place dans la langue maternelle, une interdiction nécessaire pour placer le désir (ce qui peut s’exprimer comme une inhibition à parler ou à écrire, par exemple).
Dans l’histoire de Kanniverstan, la séduction part de la richesse matérielle du lieu étranger, mais où notre bonhomme a besoin de savoir le nom de celui qui en jouit pour pouvoir s’apercevoir qu’il désire. (…) Le désir pour la langue étrangère est un désir de jouissance de l’autre. Ce qui est une méconnaissance de l’Autre. Du fait que l’autre imaginaire parle, mais parce qu’il s’exprime dans une langue différente, il ne semble pas parler comme nous et donc, peut être, jouit-il mieux. La jouissance insuffisante qui vient de ce qu’on parle, peut sans doute s’enrichir considérablement avec la pratique des langues étrangères, peut se placer mieux. Mais il y a des gens qui s’amusent toute leur vie à apprendre des langues. Evidemment ça ne suffit jamais puisque la jouissance nouvelle qu’ils peuvent acquérir est toujours insuffisante et finit, avec l’acquisition de la pratique, à ressembler à celle qu’ils connaissent déjà.
Le désir d’apprendre une langue étrangère (indépendamment de la nécessité constituée par des circonstances extérieures, l’émigration par exemple) peut être un désir d’avoir le choix, de pouvoir choisir la loi, les règles et très souvent le maître de notre jouissance. C’est le désir d’être libre de choisir un ordre, dans lequel on s’exprime, de s’en imposer un par un acte volontaire, d’apprendre enfin comment il faut parler correctement et d’en jouir. (2000 : 206)
On retiendra ici que « La jouissance43 est faîte de l’étoffe même du langage, où le désir trouve son impact et ses règles et toute la difficulté de ce terme de jouissance vient de son rapport à ce grand Autre non figurable, ce lieu de la chaîne signifiante. » (Chemama et Vandermersch, 2005 : 205).
Ce que nous dit Prasse, c’est que dans la question de l’enseignement d’une langue étrangère, il s’agit d’aménager une place telle que celui ou celle qui apprend puisse s’y inscrire comme sujet parlant, et en cela on peut y voir la condition de l’appropriation de la langue de l’autre. Ce qui conduit à entendre désir dans sa définition « de manque à être, effet de la marque du signifiant sur l’être parlant.44 » (Roudinesco et Plon, 1997, et Mijolla, 2002).
Laisser advenir la possibilité de devenir autre et s’autoriser à parler ; encore faut-il que l’enseignant donne la langue comme quelque chose qui vient au-delà de lui. Lorsque l’appropriation de la langue dépasse le niveau instrumental, dès que le plaisir s’en mêle, quelque chose vient à se dire et à se vivre dans cette langue autre qui reste inconnu dans la langue d’accès au langage.
Nietzsche45 (1870-1873) s’interrogeait sur le lien qui se doit d’exister entre l’étudiant et le lieu d’enseignement et pour lui le lien se doit de passer par l’oreille, posant ainsi le rôle de la parole. Il y a déjà chez Nietzsche et chez bien d’autres quelque chose en opposition radicale avec ce qui préside de nos jours dans le fait que l’on ne recherche pas la maîtrise ou la bonne méthode mais quelque chose qui touche à la possibilité d’un éveil.
On voit que tout ceci ne répond pas aux recommandations du CECR46 (2001 : 4).
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1Michéa, Jean-Claude, L’empire du moindre mal, Paris, Climats, 2007.
2Dardot Pierre et Laval, Christian, Ce cauchemar qui n’en finit pas – Comment le néolibéralisme défait la démocratie. Paris, La Découverte, 2016. Cf. également : Abensour, Corinne, Sergent Bernard, Testefort Jean-Philippe, Wolf Edith (dir), De la destruction du savoir en temps de paix. Paris, Mille et une nuits, 2007. Laval, Christian,Vergne Francis, Clément Pierre, Dreux Guy, La nouvelle école capitaliste, Paris, La découverte, 2011.
3Judet de la Combe, Pierre et Wismann, Heinz, L’avenir des langues, Paris, Cerf, 2004, p.48, et Prieur, Jean-Marie, « L’empire des mots morts. Lisons le CECR comme un cauchemar », in La pensée CECR, TDFLE n° 70, 2017.
4Dufour, Dany-Robert, Le Divin Marché. La révolution culturelle libérale, Paris, Denoël, 2007, p. 226.
5Décret n° 2015-372 du 31 mars 2015, J.O. du 2 avril 2015 : « Les langages pour penser et communiquer. Le socle commun de connaissances, de compétences et de culture prévu à l’article L. 122-1-1 est composé de cinq domaines de formation qui définissent les grands enjeux de formation durant la scolarité obligatoire :
1° les langages pour penser et communiquer : ce domaine vise l’apprentissage de : la langue française, des langues étrangères et, le cas échéant, régionales, des langages scientifiques, des langages informatiques et des médias ainsi que des langages des arts et du corps. »
6Lacan, Jacques, Ecrits, Seuil, Paris, 1966, p. 299.
7Benveniste, Emile, Problèmes de linguistique générale, Paris, Nrf Gallimard, 1966, p. 259.
8Lesourd, Serge, Comment taire le sujet, Ramonville Saint-Agne, Eres, 2006, p. 96.
9Dufour, Dany-Robert, « Petits arrangements entre espèces naturelles et espèces surnaturelles », in On achève bien les hommes – De quelques conséquences actuelles et futures de la mort de Dieu, Paris, Denoël, 2005, p. 17-79.
10« Dans fonction et champ de la parole et du langage en psychanalyse Lacan définit l’inconscient comme le discours de l’autre puis comme l’Autre (grand A), lieu d’un pur signifiant où se marque la division (clivage) du sujet. », article « Inconscient » in Roudinesco, Elisabeth et Plon, Michel, Dictionnaire de la psychanalyse, Paris, Fayard, 1997, p. 491. Clivé ou sujet divisé correspondent à l’expression introduite par Freud : Spaltung.
11Parole dans le sens que lui assigne Saussure (de) F., (1916), Écrits de linguistique générale, Paris, Gallimard, 1916/ 2002 et dans l’extension que lui a donnée Lacan, Jacques dans « Fonction et champ de la parole et du langage en psychanalyse », in Ecrits, Paris, Seuil, 1966. Cf. également Lebrun, Jean Pierre, La perversion ordinaire – Vivre ensemble sans autrui, Paris, Denoël, 2007, p. 54.
12Lacan, Jacques, Petit discours aux psychiatres, inédit (1966), cité in Lebrun, Jean-Pierre, Un monde sans limite, Ramonville Saint-Agne, Eres, 2006, p. 201.
13Comment entendre sujet ; les références sont nombreuses. On peut s’appuyer sur l’entrée « Sujet » in Roudinesco, Elisabeth et Plon, Michel, Dictionnaire de la psychanalyse, Paris, Fayard, 1997, p. 1030, et in Chemama, Roland et Vandermersch, Bernard, Dictionnaire de la psychanalyse, Paris, Larousse, 2005, p. 415-417. Voir également l’entrée « Sujet » du Dictionnaire des œuvres psychanalytiques, d'Assoun, Paul-Laurent, Paris, Puf, 2009, ainsi que les entrées « Sujet » et « Sujet de l’inconscient » in Dictionnaire international de psychanalyse, Mijolla, Alain (de) (dir.), Paris, Calmann-Lévy, 2002, p. 1665 et 1666.
14Arendt, Hannah, « La crise de l'éducation », in La crise de la culture, Paris, Folio, tr.,fr., 1958, 1972, p. 234-235.
15Humboldt, Von, Wilhelm, Gessammelte Schriften, Ausgabe der Preubischen Akademie der Wissenschaften. Werke – œuvres choisies, Berlin, Académie des Sciences de Prusse. GS I, 1792, p. 145, p 144 et p. 146.
16Diesterweg, Friedrich, Adoph, Sämtliche Werke, œuvres complètes, Hohendorf ed., Vol. 5, Berlin, 1961, vol. 13, Berlin, 1976 ; vol. 14, et Berlin, 1979.
17Blais, Marie-Claude, Gauchet, Marcel et Ottavi, Dominique, Transmettre, apprendre, Paris, Stock, 2014, p. 13 et Lebrun, Jean-Pierre, Les risques d’une éducation sans peine, Bruxelles, Yapaka.be, Fédération Wallonie-Bruxelles de Belgique, 2016.
18Augustin, De Magistro (Le Maître), Paris, Klincksieck, 369/ 2002.
19Prieur, Jean-Marie, Op. Cit, 2017.
20Kant, Emmanuel, Réflexions sur l’éducation, tr.fr. A. Philonenko, Paris, Vrin, 1776, 7ème édition 1993.
21Lacan, Jacques, Séminaire livre 1 (1953-1954), Les écrits techniques de Freud, Paris, Seuil, 1975 et Discours de Rome « Fonction et champ de la parole et du langage en psychanalyse » in Ecrits, Paris, Seuil, 1966.
22Wittgenstein, Ludwig (1969-1972), De la certitude, tr.fr., Paris, Nrf Gallimard, 1969-1972, 2006, p. 80.
23Cifali, Mireille, Le lien éducatif : contre-jour psychanalytique, Paris, Puf, 1994, p. 258.
24Barbaras, Renaud, Le désir et le monde, Paris, Hermann Editeurs, 2016, p. 8.
25Anderson, Patrick, Le sujet en cause. Mondialisation, didactique des langues et enseignement, in Anderson, Patrick et Migeot, François (dir), Besançon, PUFC, à paraître.
26Maslow, Abraham « A theory of human motivation », in Psychological Review n°50, Amherst, University of Massachussets, 1943.
27Herzberg, Frederick, Work and the nature of man, Cleveland, Work Publishing Company, 1966.
28Bellier, Sandra, « La notion de savoir être » in le savoir être dans l’entreprise, Paris, Vuibert, 2004.
29Goldschmidt, George-Arthur, Quand Freud attend le verbe – Freud et la langue allemande II, Paris, Buchet/ Chastel, 1996, p. 19.
30Lacan, Jacques, Séminaire XVI : D’un Autre à l’autre, in E.L.P., séance du 26 février 1969, p. 98.
31Vincent, Denise, « Le désir de savoir » in Journal français de psychiatrie n°15, Eres, 2002, p. 13.
32Hegel, Georg Wilhelm Friedrich, La phénoménologie de l’esprit, Paris, Vrin, 1807/ 2006.
33Kojève, Alexandre, Introduction à la lecture de Hegel, Paris, Gallimard, 1947/ 1971.
34Lacan, Jacques, Le Séminaire livre VI – Le désir et son interprétation, 1958-1959, Paris, Editions La Martinière, 2013.
35Paturet, Jean-Bernard, De Magistro : Le discours du maître en question, Ramonville Saint Agne, Eres, 1997, p. 98.
36Lacan, Jacques, « Subversion du sujet et dialectique du désir » in Ecrits, Paris, Seuil, 1966, p. 814. On peut y adjoindre ce qu’il précise : « Le désir s’y noue au désir de l’Autre, mais qu’en cette boucle gît le désir de savoir » (p. 802).
37Mizubayashi, Akira, Une langue venue d’ailleurs, Paris, Gallimard, 2011.
38Anderson, Patrick, Une langue à venir, Paris, L’Harmattan, 2015, p. 25.
39Article « Pédagogie » in Encyclopædia Universalis, 1992, p. 725-731.
40Arendt, Hannah, Condition de l’homme moderne, Paris, Calmann-Lévy, 1958 (tr.fr. 1961, 1983). Cf. le chapitre IV « L’œuvre », p. 187-230.
41Freud, Sigmund, « Sur la psychologie du lycéen », in Résultats, idées, problèmes, t.1, Paris, Puf, 1914, p. 227-232.
42Prasse, Jutta, « Le désir des langues étrangères», in La Clinique lacanienne, Ramonville Saint- Agne, Eres, 2000, Fasc : 1, p. 195- 208.
43Article « Jouissance », in Chemama, Roland et Vandermersch, Bernard, Dictionnaire de la psychanalyse, Paris, Larousse, 2005, p. 205.
44Roudinesco, Elisabeth et Plon, Michel, Op. Cit, 1997, et Mijolla, Alain (de), Op.Cit., 2002.
45Nietzsche, Friedrich, Ecrits Posthumes, Vème conférence, Berlin, 1870-1873, Paris, tr.fr., Nrf Gallimard, 1975.
46Cadre européen commun de référence pour les langues, Conseil de l’Europe, Paris, Didier, 2001, p.4.