N°82 / La consigne en FLE : un agent infiltré ?

Comment repérer et traiter les consignes sur le terrain en FOS ?

Cécile Medina

Résumé

Résumé : Dans cet article, nous éprouvons dans différents contextes professionnels authentiques (dentaire, aide à domicile, BTP (Bâtiments et travaux Publics) et réparateurs d'électroménager) le repérage, le fonctionnement et les éléments qui constituent les indicateurs de présence d'une consigne. Pour ce faire, nous présentons un modèle d'identification et de repérage qui nous permet d'établir des outils interprétatifs opérationnels utiles lors de la collecte de données en FOS ou lors de l'élaboration de contenus didactiques en FOS et FLP pour des discours situés et contextualisés. Enfin, nous proposons des pistes méthodologiques de formation et d'auto-formation des concepteurs et formateurs FOS.

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« Les forces de la démonstration ne doivent pas effacer les plaisirs de la découverte. » 

Philippe Meirieu

Le champ théorique de l’analyse des discours au travail a démontré : « l’interdépendance action-communication » (Lacoste, 2001), « le contrat implicite de vérité et de promesse de succès » (Bronckart, 2004 : 223) et la force des discours anticipatoires (Scollon et Scollon, 2009) comme sources de création, de régulation ou d’interruption des tâches en situation professionnelles (Medina : 170). C’est dans la continuité de ces cadres théoriques, que nous proposons d'en présenter une conception et un usage innovant dans le cadre d'une centration sur la notion de consigne, ici admis au sens « d’instruction écrite ou verbale (TLF, 2023).

Centrer la réflexion sur la notion de "consigne" comme ressource potentiellement prioritaire à identifier dans l'activité professionnelle permet au concepteur d'ingénierie en FOS de construire son analyse de besoins, sa réponse didactique (Cadet, 2005) et de développer chez l'apprenant les compétences de repérage, de compréhension, de production et de réponse adaptée en situation réelle sur site. Dans cet article, nous nous attacherons à identifier des situations professionnelles authentiques qui font émerger des problématiques spécifiques lors de la réception, l'interprétation ou la production de consignes (Moirand, 1990), afin d’illustrer toutes les étapes de l’interaction[1] (Lerat, 1995). Nous mobiliserons au cours de cette réflexion des cas pratiques et des exemples issus (corpus de collecte de données ou traces de formation) des domaines suivants : soin dentaire, aide à domicile, BTP (Bâtiments et travaux Publics) et réparateurs d'électroménager.

Nous nous attacherons tout d'abord à repérer des objets concrets de communication[2] pouvant être considérés comme des consignes en FOS, puis nous chercherons à déterminer la relation sémantique, contextuelle et interprétative pour les acteurs de la situation professionnelle lors de la réception d'une consigne. Ces éléments nous permettront d'illustrer, par des cas pratiques, l'ensemble des compétences précédemment citées et de permettre de projeter des propositions didactiques opérationnelles pour la formation des apprenant allophones en FOS. Afin de ne pas se focaliser sur un domaine en FOS nous proposons d'éprouver notre démonstration en nous appuyant sur des contextes différents et des corpus différents. Ce choix méthodologique est également motivé par le souhait dans cette réflexion de rechercher les espaces communs aux différents contextes que nous pouvons rencontrer en FOS.

 

1 Quelles typologies de consigne collecter ?

Notre démarche s'inscrit dans le cadre méthodologique du FOS (Mangiante et Parpette, 2004), et, à cet effet, la collecte de données sur le terrain est la clef d'analyse et d'interprétation (Calvet et Dumont, 1999) qui retiendra l'attention du chercheur, et/ou le concepteur de l'ingénierie de formation développée (Mourlhon-Dallies, 2008). En effet, lors de la collecte des données le chercheur-concepteur est confronté à une multitude de natures des supports et il lui appartient d'orienter son regard et son oreille sur certains faits saillants et régulateurs de l'activité observée. Il lui appartient, par la suite, de mener une analyse interactionnelle de ce matériau puis d'en proposer des exploitations didactiques directes ou médiées (documents reconstitués, par exemple dans le cadre de la méthode dédiée aux médecins (Talavera-Goy, 2008)). En s'appuyant sur cette méthodologie nous interrogerons successivement la dimension écrite de la consigne reçue puis la dimension orale de la consigne reçue afin d'en déterminer des traits caractéristiques et d'en définir les points communs.

 

1.1 Lire c'est prescrire : la consigne indirecte

Afin de tester cette hypothèse, nous centrerons tout d'abord notre réflexion sur la collecte et l'analyse de discours prescriptifs, reconnus comme consigne. Pour ce faire, nous présentons, en parallèle deux documents authentiques écrits.  Ces derniers sont issus, d'une collecte de données (Corpus-dentaire) menée dans le cadre d'une conception d'ingénierie en FOS dentaire à destination d'une chirurgienne-dentiste réalisée entre 2015 et 2020. Ces deux supports prennent un format d'affiche et peuvent être déclinés sous la forme d'un prospectus. Ils sont produits par une entreprise professionnelle intervenant dans le secteur de la santé bucco-dentaire et sont collectés dans le cabinet d'un praticien.

Le premier document (document n°1) est à destination du grand public et le second document (document n°2) est à destination des professionnels dans le cadre d’une recommandation de conduite d’un entretien spécifique. L'émetteur de document n°1 est rapidement identifiable, il s'agit de « l’USBD" (union française pour la santé bucco-dentaire) qui produit de nombreux supports informatifs (affiches, spots publicitaires, documentation pour les écoles ....). Nous sommes même ici tentés de le considérer comme appartenant à un fond culturel commun, puisque le logo est visible, reconnaissable et connu tandis que l’émetteur du second document n'est pas repérable.

Illustration n°1 : Document 1 - Discours à destination du grand public [3]

Illustration n°2 : Document 2 - Discours à destination des professionnels [4]

Ces deux exemples sont des consignes dans le domaine des soins dentaires. Le premier document permet, au chirurgien-dentiste, de disposer d'un support de médiation lors des "consignes" qu'il formule aux patients, tandis que le second est une procédure, et, en ce sens, une consigne pour lui. Nous analyserons successivement ici ces deux documents pour étayer ces éléments.

 

1.2. De la consigne écrite à la proposition didactique de production écrite et orale

Ainsi, en s'appuyant sur le document n°1, lors d'un travail effectué en formation en 2022, nous avons pu établir avec la formée des scénarios discursifs (Mourlhon-Dallies,1995), qu'elle a pu apprendre en autonomie, puis mettre en œuvre en situation authentique auprès des patients.

L'intérêt didactique de la co-conception des scripts est de permettre un travail de reformulation et de discrimination des destinataires-récepteurs par l'adaptation des registres, notamment. En formation, le travail de co-conception a permis la mise en évidence des relations lexicales de dérivation, et sur un plan grammatical et phraséologique une centration sur la reformulation. Réalisé auprès d'une formée de niveau A2, cet exercice a permis d'apprendre l'expression du conseil, de l'obligation et de mener un travail sur la prosodie, la communication multimodale et l'intonation. 

Nous présentons ci-après le résultat écrit de ce travail didactique. Le matériel didactique créé pour la formée est complété par des vidéos permettant : l'exposition à un modèle et une utilisation autonome et accessible de façon illimitée. Ces outils avaient pour vocation de contribuer à la sécurisation de la formée et la continuité du cadre didactique dans la situation d'autoformation.

Figure n° 1 : Extrait de matériel didactique, Medina-formation-dentaire-2022

Discours du document

Discours pour un patient adulte

Discours pour un patient enfant

(5 ans minimum)

2 brossages par jour matin et soir pendant 2 minutes

L'utilisation d'un dentifrice fluoré

Une visite au moins 1 fois par an chez le dentiste

L'utilisation du fil dentaire chaque soir

Une visite au moins 1 fois par an chez le dentiste, et ce dès l'âge d'un an

Une alimentation variée et équilibrée

Il faut bien vous brosser les dents deux fois par jour. Il faut le faire durant deux minutes tous les matins et tous les soirs et bien utiliser un dentifrice avec du fluor. Si vous le pouvez, il faut aussi le faire à midi après le repas.  Le soir, il est bon d'utiliser un fil dentaire ou un hydropulseur pour éviter le bourrage alimentaire.

Pensez à bien faire votre visite de contrôle une fois par an.

Il faut protéger tes dents c'est important.

Pour protéger tes dents tu dois faire attention à bien manger de tout. Mais, il ne faut pas manger trop de bonbons ni boire trop de soda.

Pour les protéger, tu dois te brosser les dents le matin et le soir, et le midi quand tu peux. Tu brosses tes dents pendant deux minutes et tu brosses bien partout. Il faut brosser en haut, en bas, à gauche et à droite, il faut bien passer partout.

Attention, tu ne peux pas encore utiliser le même dentifrice que tes parents, dentifrice adapté à ton âge.

L'exploitation didactique du document n°2 a permis, par analyse comparative avec le document n°1, de faire émerger les indices du paratexte, le repérage des émetteurs et de travailler sur la notion de temps.  L'exploitation lexicale a permis un travail plus précis sur la langue de spécialité que nous détaillerons par la suite.

Les textes des deux documents mobilisent le contexte spécifique du domaine, tout en demeurant accessibles aux lecteurs non spécialistes. Le second texte présente toutefois un lexique de spécialité plus prégnant, car le document n°1 mobilise principalement un registre de type français de la vie quotidienne, avec des termes tels que " jour, matin, alimentation, dentifrice...". Certains termes ou collocations se retrouvent à la frontière tels que :  "brossage, fil dentaire", mais sont tous accessibles à un non spécialiste du domaine. Le document n°2 mobilise, lui, des environnements contextuels du domaines relevant de la langue de spécialité, par exemple le titre : " Un enseignement à l'hygiène bucco-dentaire et parodontale simple et efficace". Dès l'énoncé du titre on relève la co-présence des registres qui induira la finalité du support, à savoir outiller les praticiens pour optimiser leur conseil et leur pratique en matière de prévention bucco-dentaire et parodontale. Contrairement au document n°1, le document n°2 induit une suite d'actions qui se réalisent au cours de plusieurs rendez-vous. Lors de chaque rendez-vous le praticien doit à la fois réaliser des actes différents et une argumentation auprès du patient afin de déterminer, d'accroître ou de susciter sa "motivation" à poursuivre ce protocole "test & drive".

Le discours écrit est conçu sur une phraséologie de l'écrit propre à la schématisation à savoir, la co-présence de types d'informations écrites (mots, nombres et symboles), l'absence de verbes conjugués au profit de la nominalisation et l’utilisation d’enchainements de lieux de lectures variés.

Ainsi bien que le document n°1 puisse en partie répondre à ces critères on ne peut que constater que la complexité de lecture apportée au document n°2, lui confère dans son aspect général également une dimension plus "technique" mobilisant des compétences plus poussées chez le lecteur. Les compétences d’un apprenant pour accéder en autonomie aux supports sont à positionner entre les niveaux B1 et B2. L’apprenant doit mobiliser : de la compréhension écrite, sa capacité à lire et interpréter un schéma, un lexique spécialisé ou un lexique de spécialité et sa capacité de déduction.

 

1.3 Entre langue courante et langue de spécialité : des registres de consignes

Si dans le premier cas, la compétence finale à travailler était "la capacité à formuler à une consigne, ou une suite de consignes, à l'oral " en s'appuyant sur des notions communicatives relatives à l'ordre et le conseil à destination du patient, dans le second cas la tâche finale ne peut être abordée par le seul travail de reformulation car les discours manquants sont trop importants ce qui est lié à la nature même du support.

En effectuant un travail de lecture et de reformulation à l'échelle de "création" d'un discours entièrement énoncé et énonçable, tel qu'effectué dans la proposition didactique d'exploitation du document n°1, il apparait alors que certaines étapes de la procédure relèvent de consignes à destination du praticien tandis que d'autres relèvent de consignes à destination du patient.

 

1.4 Des consignes, des discours et des actes

En effet, si nous nous attardons sur la première étape du schéma "Mise en évidence grâce au révélateur de plaque des défaillances du brossage par le patient avec l'utilisation de sa brosse habituelle" nous ne pouvons pas la transformer en une seule consigne. Pour atteindre cet objectif, le praticien doit effectuer plusieurs actes professionnels et discursifs liés à ces derniers, mais il doit surtout produire une argumentation finale auprès du patient visant à expliciter le résultat obtenu par le test. Les consignes sont ici toutes implicites et c'est la formulation de l'objectif qui permet par un mécanisme de déduction de créer l'ensemble des consignes qui découlent du test. Le praticien peut ainsi reformuler en une succession d'étapes : "vous devez installer le patient au fauteuil, vous devez lui annoncer que vous allez effectuer un test pour mesurer la qualité du brossage en analysant la plaque dentaire, vous devez appliquer le test révélateur, vous devez commenter la mise en œuvre du test auprès du patient, vous devez lire le résultat du test, vous devez analyser le résultat du test, vous devez informer le patient du résultat du test". Il est intéressant à cet instant de les répartir entre action et discours comme l'illustre le schéma suivant.

Figure n°2 : Processus de l'item décliné chronologiquement en consignes

Ainsi, la compétence finale pour pouvoir formuler la "prescription du modèle de brosse" (brosse à dents), repose sur des compétences en langues intermédiaires : à savoir compréhension des écrits (pour accès à l'information) et la compétence finale de production orale. Cette production orale finale à destination du patient ne reposera pas seulement sur la formulation de consignes et de conseils mais sur la capacité à présenter un fait, à argumenter et à formuler une recommandation ou une consigne.

Bien que ces deux supports présentent une volonté prescriptive et qu'ils s'adressent a priori à des destinataires différents, il est intéressant de relever que la prescription s'effectue, dans le premier cas, par un guidage des actes à réaliser, et dans le second cas, d'une description des étapes à conduire. Ainsi, on observe une intrication des contextes discursifs pour le praticien, entre FLE et FLP, qui nécessite appropriation par le chercheur-observateur qui doit se constituer une culture du domaine afin de bien identifier ces supports comme pertinents, ou non, lors de la collecte de données afin d'en anticiper les pistes d'exploitation didactique.

 

1.5 Conclusion partielle

Nous retenons, à cette étape de notre réflexion :

- que lors de la collecte des données des documents écrits de l'environnement professionnel des pistes didactiques peuvent être envisagées et qu'il est opportun de questionner les acteurs sur l'efficience et la réalité de la réalisation des actes discursifs ou actionnels qui leurs sont liés,

- que la compétence de repérage-identification de l'émetteur et surtout des destinataires des informations écrites est une compétence stratégique pour le formé,

- que les documents procéduraux et prescriptifs écrits présents, dans l'environnement et l'écosystème, au cours de l'observation sont des supports facilitateurs pour permettre l'identification de cette communication poly-canaux et poly-référentiels.

Après avoir centré notre regard sur les documents prescriptifs écrits disponibles lors de la collecte de données et les pistes didactiques envisagées afin de développer chez l'apprenant des compétences d'identification, de compréhension et de communication poly-canaux et poly-référentielles en un même lieu et entre spécialistes et non spécialistes, nous élargissons notre champ de collecte à la dimension multimodale de la prescription. 

 

2. Dire c'est prescrire : la consigne implicite et indirecte

Il nous appartient, de la même manière, de nous interroger à présent sur la collecte de discours prescriptifs oraux en situation authentique. Pour des questions d'unité de contexte de notre réflexion, à ce stade de notre démonstration, nous proposons d'extraire de notre "Corpus-dentaire" une consigne prononcée au fauteuil par le chirurgien-dentiste. Ainsi, après avoir accueilli le patient, le praticien lui propose la consigne suivante :"Vous pouvez vous assoir au fauteuil". Lors de l'émission de la consigne, le patient et le praticien sont dans l'entrée du cabinet et l'assistante dentaire effectue des aller-retours entre le cabinet de soin et la salle dédiée au nettoyage des instruments. Prononcée en présence de l'assistante dentaire, cette consigne va générer deux actions distinctes, schématisées ci-après.

Illustration n°3 : consigne indirecte (cas Corpus dentaire)

Immédiatement après l'émission de la consigne, on observe que le patient va s'installer au fauteuil, tandis que l'assistante va préparer et lui remettre la "bavette" et se positionner près du fauteuil.

Il y aurait dès lors deux sens précis pour cette consigne en fonction du destinataire qui l'interprète. Le langage se fondant sur une économie, le praticien économise une consigne à destination de l'assistante, car le "démarrage" de la prise en charge du patient nécessitant sa présence est déclenchée par la consigne à destination du bénéficiaire du soin. Nous observons que cette situation se répète lorsque quelques minutes plus tard, le praticien annonce "ouvrez la bouche", ce qui déclenche la mise en fonction de l'aspiration par l'assistante et l'ouverture de la bouche par le patient. Cette capacité à multiplier les destinataires et à adresser indifféremment des messages est confirmée tout au long du soin, notamment lorsque le praticien énonce "ouvrez grand s'il vous plaît" suivi de "j'ai besoin de plus de lumière s'il vous plait". On notera que ces deux annoncent s'appuient sur une formule de politesse, que la première est directive puisqu'elle est formulée à l'impératif, tandis que la seconde est performative, puisqu’elle est formulée au présent et insiste sur un "besoin" qu'il conviendra, pour l'assistante, de satisfaire. Enfin, au cours de ce même soin, la praticienne, après avoir annoncé au patient "on va pouvoir mettre en place l'amalgame", poursuit par une consigne, à destination de l'assistante "vous pouvez préparer, s'il vous plaît". Cette dernière déclenchera un mouvement de l'assistante qui va se diriger vers le meuble dédié aux produits de traitement et ouvrira plusieurs tiroirs et disposera sur un plateau plusieurs éléments (produit, ustensiles. On constate également que, parfois, le praticien appuie du regard le destinataire, mais que cela n'est pas systématique. Il est également important de souligner que, lorsqu'il est équipé de ses lunettes grossissantes, la captation de la destination du regard est, notamment lorsqu'il conserve ces dernières, peu lisible et il est complexe pour les participants de l'échange, ou pour l'observateur, de s'appuyer sereinement sur cet élément de communication multimodale. Enfin, pour conclure cette description, il nous faut ajouter que le port du masque chirurgical par le praticien (fait qui n'est pas lié à la crise sanitaire, mais à des règles d'hygiène) limite la prise d'autres informations mimo-gestuelles, rapprochant cette situation de communication d'une situation au cours de laquelle la parole est la seule source d'information.

Après avoir observé la récurrence du phénomène, force est de constater que tout au long de la prise en charge du patient, le praticien adresse des consignes distinctes à ses deux destinataires (patient et assistante) mais qu'il adresse également des consignes au patient qui déclenchent des actions pour l'assistante. C'est pourquoi, la réponse actionnelle de l'assistante valide l'hypothèse selon laquelle il existe, dans ce cadre, des consignes implicites et indirectes qui fonctionnent comme des routines professionnelles.

Pour l'observateur, un indice de présence de consigne indirecte ou implicite est à rechercher dans l'action ou dans le discours d'un des participants de la situation observée. En effet, c'est par la réponse que l'on peut rétroactivement identifier la présence d'une consigne. Par la suite, la validation de la fonction de consigne sera à rechercher auprès des participants observés ou auprès d'un spécialiste du domaine au moyen d'un discours "sur" et d'une parole "sollicitée" faisant émerger une verbalisation de la consigne, telle qu'elle pourrait être observée en présence d'un personnel en formation, par exemple.

Après nous être appuyés sur un seul environnement contextuel comme cadre de notre démonstration, nous souhaitons étendre le champ des possibles en confrontant ces résultats et remarques retenus en FOS dentaire à un autre secteur d'activité mettant en relation un professionnel et un particulier non-spécialiste.

 

2.1. L'échec d'une consigne implicite directe

En effet, l'approche par la rétroaction de la fonction de consigne nous permet également de faire état d'un cas d'implicite directe de consigne conduisant, cette fois, à un échec de la situation de communication. C'est en effet, de l'absence de réaction qu'émerge la fonction de consigne de l'exemple suivant, extrait d'un corpus nommé "Corpus-aide-à-domicile" constitué entre 2016 et 2019.

Afin de comprendre la situation, il nous faut tout d'abord contextualiser l'échange présenté ci-après. Une aide à domicile intervient au domicile d'une personne âgée afin de l'aider dans ses tâches ménagères (ménage, courses, linge...) depuis cinq ans. Elles entretiennent une familiarité et des habitudes. L'aide à domicile est allophone. Elle réside en France depuis plus de quinze ans, elle n'a bénéficié d'aucune formation à la langue française, elle est estimée de niveau B1 à l'oral et n'a pas pu être évaluée à l'écrit, elle a déclaré "ne pas savoir trop lire et écrire". L'échange apparaît en fin d'intervention. L'aide à domicile est en train de se préparer à ranger son matériel, ici un balai, lorsque la personne âgée l'interpelle et lui signale qu'"il reste de la poussière de la poussière à côté d’[elle] ».

On relèvera que l'émetteur adjoint à son annonce, un geste de la main désignant la zone concernée par la poussière, toutefois, l'aide à domicile ne réagit pas à ce message et poursuit sa tâche de rangement. Face à cette absence de réaction de la part de l'aide à domicile, la personne âgée énoncera : " X il faut ramasser la poussière, là, à côté de vous", ce qui donnera lieu à l'action de l'aide à domicile. L'analyse de l'échange nous permet de déduire que nous assistons à une consigne car il y a réalisation, par l'aide à domicile, de l'action sollicitée par l'émetteur.

 Mais il est intéressant de relever que ce passage de consigne avait tout d'abord échoué lors de l'utilisation d'une formule implicite et que c'est grâce à l'action corrective de reformulation couplée à la réalisation de la tâche que nous pouvons repérer la première consigne. Réalisée dans une visée performative, (Austin, 1955) l'implicite du message nécessite une double interprétation pour le récepteur, qui doit dans un premier temps en comprendre le sens littéral puis dans un second temps en comprendre l'implicite.

Ainsi, si nous comparons les deux consignes implicites étudiées nous relevons que la consigne implicite directe échoue tandis que la consigne implicite indirecte réussit. À ce stade de la réflexion, et en comparant les deux situations, nous pouvons émettre les hypothèses suivantes :

- l'action, la réponse ou l'émission d'une consigne régulatrice-correctrice permet d'identifier la présence d'une consigne a posteriori,

- la consigne entre professionnels semble admettre plus efficacement l'implicite,

- les routines et habitudes résistent mal à l'incompréhension de la langue ou de la fonction de consigne d'un message même dans un contexte professionnel.

Afin de mettre à l'épreuve la dernière hypothèse émise, il convient à présent de questionner la multimodalité lors du passage de consignes.

 

2.2. Bouger c'est aussi prescrire

La consigne, peut revêtir plusieurs formes orales et écrites, comme nous venons de l'illustrer mais également actionnelles, comme nous l'avons esquissé et comme nous allons l'analyser plus précisément ici. En effet, nous venons d'observer que la consigne discursive peut générer des réponses discursives ou actionnelles. Dans un exemple présenté dans un précédent article (Parpette & Medina, 2012) nous avions longuement analysé l'interaction entre un grutier et le chef d'équipe au sol sur un chantier de construction en gros œuvre. Le chef d'équipe utilise un talkie-walkie pour échanger avec le grutier. Il lui demande de déplacer des banches, appelées "125" dans l'extrait qui suit. Le choix terminologique de "125" permet au grutier de savoir quelle banche est désignée, car "125" fait en réalité référence à la dimension de la banche concernée car il en existe plusieurs, celle-ci mesure donc un mètre vingt-cinq. Le chercheur-observateur, positionné auprès du chef de chantier peut enregistrer l'échange au talkie-walkie entre les deux participants de l'échange et dispose du même point de vue que celui du chef de chantier. Nous présentons ici un bref extrait de cette collecte de données.

 Le chef : la 125 qu’est là y a X dessus on la met à côté

            Le grutier vient approcher les crochets de la chaine de la grue pour accrocher la banche et l’ouvrier sur la banche accroche celle-ci à l'aide des crochets, à la grue

Le chef : monter monter monter monter

"Le grutier démarre et la parole du chef accompagne la montée de la banche"

Note ajoutée pour le présent article : aucune communication visuelle n'est possible entre les acteurs et il n'y a pas de gestes communicatifs effectués par le personnel au sol

Nous avions démontré la relation consigne-action, la clôture d’une tâche comme la source d’une nouvelle consigne et que « La tâche prévue est menée à bien grâce à une combinaison entre parole et action(...). »

Or si nous admettions que l'action générait une nouvelle consigne, il est alors légitime de reconsidérer cet exemple en admettant qu'une réponse actionnelle est elle-même une consigne. Cet agir génère une réponse qui peut être discursive comme dans l'échange présenté, mais qui peut également être actionnelle. En effet, lors des interactions avec le grutier le talkie-walkie n'est pas toujours présent, car plusieurs personnels peuvent interagir avec le grutier. Dès lors, une fois que, grâce au talkie-walkie, le chef de chantier ou le chef d'équipe a indiqué vers quel personnel au sol le grutier devait se diriger, le personnel au sol débute une interaction avec le grutier par un geste.

 C'est lorsqu'il aperçoit les crochets en mouvement se diriger vers lui, que ce dernier interprète que la grue est "disponible" pour lui et qu'il va pouvoir engager sa manœuvre. La mise en mouvement de l'objet est une forme d'énonciation de consigne car cela induit une réponse. L'interaction débute par un geste de repérage, main en l'air pour être repéré, puis se poursuit par un geste de désignation, puisqu'il indique au grutier l'objet à accrocher ou l'endroit précis pour déposer et décrocher. Une fois la prise d'information réalisée, débute la coopération dans l'action. Le grutier débute la descente des crochets et le personnel au sol effectue un pointage vers le sol accompagné de cercle pour désigner au grutier qu'il faut descendre. Une fois à hauteur de l'accroche, et lorsque les chaines sont suffisamment lâches le personnel au sol effectue un geste bref d'écartement des bras. Dans cette succession d'actions, on remarque que les consignes successives sont toutes actionnelles, qu'il s'agisse des gestes du personnel au sol ou des mouvements des crochets de la grue.

Dès lors, force est de constater que si nous admettons que la consigne est créatrice d'un agir, alors la consigne actionnelle, telle que présentée dans l'exemple précédent, fait partie intégrante des typologies de consignes à collecter en contexte FOS, à analyser et à introduire dans la proposition didactique.

L'interrelation du discours et de l'action peut conduire à différents scénarios, synthétisés dans le schéma ci-après. C'est cette pluralité des échanges cumulée à l'intrication des types de discours et de l'action que le chercheur-observateur en FOS doit : repérer, questionner et collecter en s'appuyant sur les tâches réalisées en repérant les consignes implicites, explicites indirectes et directes.

Figure n°3 :  Interrelations des typologies de consignes qu'elles soient de nature implicite ou explicite

En effet, les réactions discursives ou actionnelles sont déclenchées par des actions, des discours, une non-réponse de type silence et/ou immobilisme. Ainsi, nous avons pu observer dans les exemples précédents :

- qu'une consigne écrite pouvait susciter une réponse discursive, lorsque le praticien conduit le test d'hygiène bucco-dentaire, par exemple,

- qu'une consigne discursive pouvait générer une réponse discursive, lorsque le praticien questionne le patient, par exemple,

- qu'une consigne discursive pouvait générer une réponse actionnelle, lorsque le praticien demande au patient de s'assoir (consigne explicite) et que l'assistante lui donne la bavette (consigne implicite), par exemple,

- qu'une consigne discursive est déclenchée par l'incompréhension du récepteur, manifestée par l'immobilisme et/ou le silence, dans le cas de l'échange entre la femme de ménage et la personne âgée, par exemple,

-qu'une consigne discursive est déclenchée par une action, lorsque le chef de chantier s'adresse au grutier, par exemple.

C’est pourquoi, cette capacité à percevoir les potentielles variations doit faire partie intégrante de la réponse didactique pour correspondre aux besoins des apprenants en situation professionnelle et s’appuyer sur un dialogue entre le didacticien et un professionnel du domaine pour être complet et cohérent. A l’issu de la formation, l’apprenant devra pouvoir identifier qu’il sera confronté à un schéma interactionnel qui peut varier. Pour ce faire, l’enseignant proposera une démarche permettant de faire émerger le fait que les potentialités interactionnelles reposent sur des compétences professionnelles, la capacité de détection de consignes implicites discursives ou actionnelles et des compétences en langue.

Pour y parvenir, un travail de repérage, sur la base d'éléments vidéos, puis de mise en évidence des mécanismes par le biais de manipulation de cartes illustrées, par exemple, suivi d'une mise en jeu au travers d'une simulation et complétée par un exercice d'argumentation "pourquoi a-t-il dit ou pourquoi-at-il fait " devrait permettre de faire émerger cette perception d'un continuum induisant les dimensions implicites et explicites, ainsi que la variété possible des mécanismes de couples action-réponse dans la situation FOS travaillées en lien avec une variété d'interlocuteurs.

Afin d'illustrer cette hypothèse didactique, nous nous attacherons dans la suite de cet article à mener une analyse au travers d'études de cas des éléments interprétatifs requis pour repérer la présence d'une forme de consigne. Afin d'éprouver l'élaboration de notre modèle interprétatif, nous confronterons ce dernier à plusieurs situations FOS en nous appuyant sur les contextes professionnels précédents et en y ajoutant celui de réparateurs d'électroménager sur un site de réparation-recyclage. 

 

3. Apprendre à détecter les cas de consignes pour le chercheur-observateur[5]

Nous avons donc pu observer que c'est grâce à la réalité de la réponse (orale, écrite, actionnelle ou reformulation de la consigne) que nous avons interprété que nous étions en présence d'une consigne. Pour ce faire, nous avons appliqué une méthode empruntée à l’ethnométhodologie qui se décompose de la manière suivante : observation du phénomène langagier par le chercheur, identification d’un élément pouvant avoir valeur d’énoncé performatif ou anticipatoire par le chercheur, puis mise en jeu de cet élément par le chercheur auprès de la population observée et observation de la réponse produite par la population observée. Dès lors, si la réponse est positive, le chercheur en déduit la valeur performative ou anticipatoire de l’élément, a contrario si la réponse est négative, il en déduit la valeur non signifiante dans la dimension performative et anticipatoire étudiée. 

 

3.1 La prise d'informations

Tels que définis par Scollon & Scollon, en 2001, les discours anticipatoires permettent une projection dans l'activité et l'interaction. Leur maîtrise et leur connaissance participent de l'agir social ou professionnel intégré par les participants de l'échange, mais peuvent faire défaut au chercheur-observateur. Afin de permettre à celui-ci de se construire une culture, permettant de détecter cet agir social et professionnel, il réalise une collecte de données in situ complétée, en amont et en aval, par une veille documentaire et des temps informatifs. Lors de ces phases, il focalise son attention sur le développement de sa capacité à percevoir la paire "émetteur(s)<->destinataires(s)/récepteur(s)".

Les interactions étant émises au sein d'un collectif, nous avons observé que seul l'un des participants ou une partie d'entre eux peut l'interpréter comme telle. Il nous faut donc élucider ce qui détermine la consigne pour les uns, qu'il y ait réponse ou non, par opposition à ce qui fait défaut aux autres pour l'interpréter comme tel.

En comparant et en schématisant les exemples précédemment utilisés, nous remarquons les réponses suivantes.

Illustration n°4 : Comparaison de réponse à l'émission d'une consigne

Dans ces deux exemples nous relevons que plusieurs personnes sont réceptrices d'une même consigne. Dans le premier cas, cela donne lieu à plusieurs réponses actionnelles, donc nous sommes en présence de deux destinataires a priori. Dans le second cas, trois personnels au sol et le grutier sont récepteurs mais seul le grutier réagit, il est donc le seul destinataire a priori.

Toutefois, lors des entretiens informels conduits lors de l'observation participante, les trois personnels au sol ne se sont pas considérés comme "non-destinataires", car cette consigne et la réponse, donc la paire "émetteur<->récepteur" construite dans le cas présent, leur permet de détenir une série d'informations. En effet de cette situation, ils retirent que la grue ne sera plus disponible tant que l'action de leur collègue sera en cours et il leur appartient de se réorganiser en fonction, s'ils avaient besoin de la grue. De plus, ils anticipent qu'ils devront éventuellement :

- réajuster leurs déplacements, car la zone de charge et de décharge est un espace dangereux,

- "actualiser" l'étape en cours de réalisation sur cette zone du chantier, car suivant le dépôt ou la prise effectuée par la grue, cela leur donnera une indication de ce qui va être réalisé par la suite, les impliquant éventuellement,

- se réorganiser, car tout le temps de la manœuvre ils ne pourront solliciter le personnel au sol, celui-ci est en train de réaliser une tâche prioritaire,

- demander au personnel en lien avec la grue "de prendre" celle-ci à leur tour une fois la manœuvre terminée, car il est plus simple de "récupérer" la grue dans ce cas-là.

Il est donc intéressant de relever que dans le second cas c'est la quantité d'informations transmises par la consigne et sa réalisation qui apportent un éclairage sur les réactions des autres personnels présents et à proximité, et que dans les deux cas ce sont les destinataires eux-mêmes qui se sont considérés comme récepteurs. Leur réception par leur perception de leur posture de "destinataires" se détermine soit par leur réception d'information soit par leur réponse.

Dès lors, le chercheur-observateur[6] doit collecter ces deux formes de réponses lors de sa collecte de données et doit analyser ces deux aspects pour détenir une compréhension complète des phénomènes. Il convient dès lors de questionner ce qui détermine, pour les récepteurs, ce qui va leur permettre de se placer comme "non-concernés", comme destinataires devant produire une réponse ou comme destinataires d'informations. Le chercheur-observateur doit donc adopter une posture d'apprenant, il doit apprendre pour pénétrer son terrain et doit apprendre de son terrain. 

 

3.2 Processus interprétatif et décisionnel ?

En effet, " De la multiplicité des facteurs qui interviennent dans l'établissement du sens résulte la complexité des faits de sens." (Mahmoudian, 1997 : 13). C'est dans ce cadre que nous avons déterminé le "processus de contextualisation" au moyen d'un "parcours d'interrogations" (Medina, 2014 : 267) des discours et des actes pour les métiers de la construction (BTP), puis que nous avons mis à l'épreuve d'autres contextes FOS, ce qui nous a permis d'en déduire le modèle suivant.

Figure n°4 : Modèle interprétatif et décisionnel

L'entrée dans le processus interprétatif débute par une action ou un discours qui va permettre aux participants de l'échange de s'engager, ou non, dans une réponse discursive ou actionnelle. Or il apparaît nettement que la réponse ou la non-réponse (notamment dans le cadre de consignes collectives) emprunte un parcours d'interrogations individuelles qui permettent aux participants de l'échange de déterminer leur implication, puisque à chaque étape du processus ils déterminent s'ils sont concernés ou non.

Certaines consignes explicitent une partie des éléments, comme dans l'exemple suivant transcrit[7] d’enregistrements audios :

"Monsieur XX vous allez prendre le frigo #marque# #référence#(...) Monsieur XY vous allez vous occuper du lave-vaisselle #marque# #référence# ", extrait d'une collecte de données sur un chantier d'insertion dans une structure de réparation de matériel électroménager.

Cette consigne est produite par le responsable de site, le matin au démarrage de la journée de travail. Le responsable de site et tous les personnels sont dans le bâtiment principal, où sont disposés tous les matériels entrant pour traitement. L'énonciation est collective.

On peut constater que le responsable adresse individuellement deux tâches en énonçant le nom des destinataires. Bien que les tâches et les destinataires se succèdent on remarquera, qu'il leur demande de "prendre" pour l'un et de "s'occuper" pour l'autre. Bien que ces deux verbes diffèrent, le traitement attendu pour ces deux appareils est cependant identique.

En effet, ils doivent :

- débuter par un diagnostic visuel,

- réaliser une recherche de panne,

- déterminer la destination de ce matériel, à savoir la réparation ou le démontage pour pièces,

- transmettre leur décision à leur chef d'équipe pour validation ou refus.

Ils doivent dès lors, a priori, réaliser les mêmes réponses. Mais nous observons cependant les réalisations suivantes.

Figure n°5 : Modèle interprétatif ajusté d'un destinataire

Dans ce cas, il y a une parfaite réussite de la transmission de consigne, validée par le biais de la réalisation, le récepteur est bien destinataire. Dans le cas suivant, le récepteur n'est pas le destinataire principal, toutefois il y a réussite de la transmission, puisque ce dernier en retire des informations organisationnelles pouvant lui permettre d'ajuster ses actions.

Figure n°6 : Réussite du modèle interprétatif ajusté d'un récepteur

Après avoir commenté brièvement les cas de réussite, nous nous concentrons maintenant sur les cas d'échecs de ces processus. Le premier cas d'échec observé concerne l'un des participants, non destinataire, mais qui ne parvient pas à être récepteur.

Figure n°7 : Échec du modèle interprétatif ajusté d'un récepteur

Cet échec ne nuira pas à l'organisation générale de l'équipe et ne donnera pas lieu à l'émission d'une consigne de régulation, contrairement au cas suivant, qui donnera lieu à une reformulation de consigne adressée, considérée comme régulatrice. En effet, dans la figure 8 nous présentons le cas d’une consigne non-interprétée comme telle, ce qui induit une absence de réponse du destinataire (Monsieur XY).

Figure n°8 : Échec du modèle interprétatif ajusté d'un destinataire

Le niveau général de français de « Monsieur XY » lui permet d’accéder au sens littéral de l’annonce, il est destinataire de cette dernière au sein du collectif qui reçoit les consignes du chef d’équipe, et à ce sens il est « potentiellement concerné » mais il n’a pas la capacité de déduire le sens précis de « vous allez vous occuper de ». Dès lors, à la fin de la transmission, nous relevons que ce dernier est resté immobile et qu’il semble attendre une autre consigne. Cette hypothèse est validée par l’action du chef d’équipe qui se dirige vers lui et qui lui explique alors avec une grande précision l’ensemble des tâches à effectuer sur l’objet. L’incapacité de « Monsieur XY » à transposer « vous allez vous occuper de … » peut reposer ici sur une double compétence : la capacité à comprendre le message sur un plan langagier et la capacité à comprendre le message sur le plan des attentes professionnelles induites par l’état général de l’objet à traiter, des actions réalisées précédemment sur ce dernier ou des habitudes organisationnelles de répartition des tâches dans l’atelier.

En situation de formation FOS, il est particulièrement fréquent d'observer des situations collectives et collégiales. La complexité pour le chercheur-observateur porte donc sur sa compétence à repérer et analyser les différentes paires "émetteur-récepteur(s)/destinataire(s)" et la multiplicité des enjeux comme l'illustre le schéma suivant.

Figure n°9 : Modèle interprétatif ajusté des récepteurs/destinataires

Afin de pouvoir interpréter cette consigne le chercheur-observateur doit disposer de ressources (au sens de connaissances) dans le domaine, pour pouvoir explorer, in situ, la réalité des tâches lors de l'observation sur site (participante ou non) et questionner les acteurs. Toutefois, il est fondamental d'entendre que ce processus interprétatif est à mobiliser en tant que modèle et qu'il nécessite, pour être optimum, d'être sous-détaillé pour répondre aux contraintes et besoins spécifiques des contextes FOS traités. 

 

3.3. Se former et s'informer pour détecter la consigne au cours de l'agir

Ce type de consigne devient dès lors complexe à identifier pour un néophyte du domaine professionnel, car la consigne déclenche des séries d'actions différentes. Or nous savons que : « chaque époque et chaque groupe social a son répertoire de formes de discours dans la communication socio-idéologique » (Bakhtine, 1977 : 40). Le chercheur-observateur s'acculture donc progressivement afin de devenir un membre du groupe social visé.

Cette acculturation lui permettra d'interpréter les actions et interactions s'inscrivant dans le processus professionnel défini, intégré et connu des participants formés dans le domaine. Dès lors, le chercheur-observateur disposera de ressources lui permettant de solliciter les sous-schémas procéduraux, propres à chaque domaine. Ces outils de repérage et d'interprétation lui permettront de centrer son analyse sur la part langagière à traiter lors de la phase de didactisation, puisqu'il s'est départi de la quête exclusive de formes langagières prescriptives. Les consignes observées revêtant des formes variées, et comme nous avons conclu que c'est de la réponse que naît la rétroaction de l'identification de la présence de consignes, nous recommandons, d'adopter une recherche d'indices permettant la catégorisation de la fonction des consignes.

En effet, la consigne peut revêtir : 

- une valeur générale de macro-tâche, c'est-à-dire qu'elle porte sur l'organisation de la journée par exemple ou qu'elle prend la forme d'un affichage ou d'une rédaction de procédure,

- une valeur de micro-tâche, c'est-à-dire qu'elle porte sur l'ajustement d'un geste professionnel ou l'interruption d'une action.

Dans l'exemple qui suit, nous présentons un cas typique de consigne à valeur générale. Extraite du "Corpus-Eurovia-Cd4", collectée sur des chantiers de voirie durant 3 ans.  Dans cet exemple "I2", le chef de chantier, et "I" sont en train de planifier la réalisation de la pose des bordures sur une chaussée en réfection. Cette macro-tâche se décompose de la manière suivante :

- 1. mise en place des cordeaux,

- 2. préparation du sol,

- 3. préparation du lit de pose,

- 4. pose des bordures et

- 5. réalisation des joints.

À ce stade de réalisation, " I" et "I2" ont positionné les cordeaux et préparé la pose, ils vont donc débuter l'étape lit de pose et pose de bordures, ce qui est l'enjeu de cet échange.

" 1.05.18 I2 : faut pas qu’il mette l’arrière là – faut qu’on finisse pour vendredi –

I : pour vendredi ?

I2 : oui- I : pour ce soir c’est fini –

I2 : non pas tout- oh – on sera pas loin-

I : ouais-

I2 : j’ai compté il restait quatre vingt dix mètres entre les parkings et ce côté là- les fonds de parking - les fonds de parking c’est quatre vingt dix – hier on_ a fait quatre vingt quinze- et aujourd’hui on_ est quand ? on_ est mercredi ? –

 I : oui – ouais pour demain soir- pour demain soir c’est fini =

I2 : ouais pour les joints après –

I : ah ouais pour les joints –

I2 : normalement c’est bon – si il y a pas trop de pluie demain –

I : les joints c’est bon si ça gèle pas trop-

I2 : la pluie demain – le gel c’est fini –

I : la pluie demain ?

I2 : j’ai regardé la météo – il y a des vents d’ouest"

On constate que :

- cette consigne planifie sur plusieurs jours le travail,

- fait état des contraintes pour la réalisation d'autres tâches qui ne pourront être réalisées à cet endroit,

- tient compte des différents aléas (ici la météo),

- génère une succession de micro-tâches constitutives réalisées en partie par I et I2.

Ce type de consigne, visant à prescrire une activité dans le temps pour plusieurs travailleurs, rejoint le cas de distribution des appareils d'électroménagers, cité, et fut également collecté sur un chantier d'insertion en maraîchage, lorsque le matin, le responsable de site répartit les tâches. Ce type de consignes est linguistiquement marqué par un usage quasi systématique de marqueurs temporels et s'appuie sur l'utilisation d'un futur proche et/ou d'une structure modale du type "il faut ...". On relève également que lorsque plusieurs interlocuteurs sont présents, l'émetteur adresse spécifiquement les tâches en nommant les destinataires, ou en les désignant (regard appuyé et dirigé ou geste de monstration). C'est parce qu'elle remplit ses fonctions de création de l'action, de répartition, d'informations pour tous et qu'elle déclenche des processus que nous la qualifions de consigne à valeur générale.

Les consignes à valeur générale ont vocation à générer, au besoin, des consignes à l'intérieur du processus actionnel enclenché et qui porteront sur des micro-tâches. Dans l'exemple suivant, nous illustrons la notion consigne à valeur de micro-tâche en nous appuyant sur un autre extrait du corpus "Corpus-Eurovia-Cd4" toujours entre "I" et "I2"[8].

"0.44 I2 : t’as été chercher la tronçonne ? I1 : ah non- I : la clef est sous le siège=" (Par la suite "I" ira prendre les clefs pour ouvrir la porte de la baraque de chantier et récupérer la tronçonneuse.)

Il est ici intéressant de relever que contrairement à la consigne à valeur générale, la consigne exprimée ne repose pas sur une utilisation d'une tournure linguistique correspondant à un ordre, une injonction ou un conseil, mais sur l'usage de l'implicite, comme nous l'avions observé entre le chirurgien-dentiste et l'assistante. En effet, "I2" vérifie la réalisation de la micro-tâche préparatoire nécessaire à la tâche en cours, à savoir l'étape d'approvisionnement. Dans ce contexte, ils ont besoin d'une tronçonneuse, mais "I" ne l'a pas apportée. Sans lui dire d'aller la prendre, "I2" lui indique où se trouvent les clefs pour y accéder. Cette consigne performative génère une réponse pour "I" qui ira rechercher les clefs puis la tronçonneuse.

Nous en déduisons que le modèle interprétatif se répète à l'infini, mais que les consignes, suivant l'étape à laquelle nous nous situons seront plus ou moins déterminantes et agiront comme des ajusteurs de valeur.

Figure n°10 : Modèle interprétatif détaillé des récepteurs/destinataires

C'est donc un processus répétitif (Mondada, 2002), réalisé intuitivement par les participants de l'échange, qui fait partie des compétences des personnes observées, qui doit être maîtrisé par le chercheur pour faciliter sa collecte et son analyse de données et qui doit être élaboré en amont de l'intervention lors de la phase d'acculturation (Lehmann, 1993).

 

Conclusion : pour poursuivre vers une acculturation nécessaire des chercheurs et des didacticiens

Toutes ces étapes ne peuvent reposer sur l'expérience seule des apprenants et leur capacité à développer les compétences précédemment décrites. En effet, pour parvenir à l'opérationnabilité des compétences travaillées en situations réelles, ces dernières auront au préalable été traitées, analysées, enseignées et mise en situation au cours de l'expérience didactique. Dès lors, la qualité de la proposition didactique reposera, en partie, sur la l'acculturation du didacticien au domaine traité. Pour conduire la phase d'acculturation, le chercheur et le didacticien s'appuient sur des données authentiques, sollicitées ou reconstituées, dans une démarche planifiée de montée en compétences du chercheur et du didacticien, dans le domaine, avant la mise en situation de collecte de données sur le terrain. Pour ce faire, la veille documentaire rigoureuse permettra : d'identifier les compétences métiers attendues, de se familiariser avec le discours de spécialité (terminologie, sigles ...), d'anticiper les espaces et l'environnement sonores (ce qui facilitera un bon déplacement sur site et optimisera la captation sonore ou vidéo) et de débuter sa familiarisation avec les gestes professionnels qui seront observés (gestes récurrents et gestes occasionnels).

Ces prérequis à la présence sur site permettront au chercheur et au didacticien de solliciter des interactions (Portine, 1990) en contexte qui éclaireront la compréhension, comme exposé précédemment. Pour ce faire il est recommandé de s'appuyer sur une démarche méthodologique solide qui permet de pénétrer, de comprendre puis d'interagir pour pouvoir conceptualiser et analyser.

Comme le recommandait Challe (Challe, 2002 : 122), en amont de la collecte il faut se constituer une "culture générale du domaine", car une des premières étapes repose sur la construction de son savoir (2002 : 122), le chercheur tout comme le didacticien, (Abou Haidar, 2019) ici nommé "formateur" doivent s'acculturer.

De cette manière, ils pourront répondre à leur besoin en langue-culture du contexte FOS traité. Or, c’est lors de l’étape cruciale de la collecte de données qu'ils rencontrent ce qu’ils ne savent pas. Ainsi inscrits dans une posture d’ignorants conscients, ils pénètrent un domaine de spécialité afin de : le rencontrer, le découvrir et peu à peu pouvoir se l’approprier. Gardant toujours à l’esprit que l'objectif n’est pas de devenir un professionnel du domaine, ils doivent cependant faire leur la langue-culture à observer. Pour ce faire, ils accèdent à une partie du domaine visé par le biais de discours, notamment les discours commerciaux ou de vulgarisation, comme présentés dans le cadre des discours prescriptifs collectés chez le chirurgien-dentiste.

Au cours de cette étape, ils acquièrent de nouveaux outils terminologiques, procéduraux et conceptuels qui permettront de pénétrer des discours plus complexes ou plus contextualisés du domaine. En décortiquant spécifiquement cette étape d’acquisition du savoir en FOS, nous remarquons qu’il est souvent opportun de débuter par une langue “à propos de” ou “ sur le domaine” puis une langue transitoire avant d’atteindre la langue du domaine. Car, « pour que se constitue un champ de réflexion sur le langage au travail, il a fallu que quelques distinctions soient d’abord posées, avant d’être elles-mêmes soumises à critiques. Il s’est ainsi révélé éclairant de distinguer entre “ langage sur le travail ”, “ langage dans le travail ”, “langage comme travail ” » (Lacoste, 1995 : 23). Ces trois dimensions sont donc à prendre en compte lors du traitement et de la classification des documents au cours de la collecte. À ce stade de la démarche il ne convient pas d’exclure des ressources, car ces dernières permettent au formateur d’accéder à la connaissance du domaine, mais il convient d’en connaître et d’en reconnaitre la source et la fonction afin de pouvoir déterminer si elles seront conservées pour la partie didactisée de la formation. Il existe donc des ressources pour le formateur et des ressources pour le formateur et le formé (ressources pour la formation accessibles aux deux). Il est essentiel de percevoir ce qui relève de l'agir en professionnel en langue française ou de l'agir en professionnel en français et à la française, ce qui permettra in fine d’observer ce qui relève ensuite de l’appropriation personnelle de l’agir professionnel de l’apprenant, si l’on considère que la formation s’inscrit dans une démarche interculturelle. C'est cet élément, qui à nos yeux reste le plus sensible à mener lorsque la collecte s'effectue numériquement ou en dehors de l'espace francophone pour lequel la formation FOS sera, par la suite, développée.

De plus, cette action permettra également de neutraliser le "déséquilibre en miroir" (Mangiante et Parpette, 2004), concept que nous étendons à l'étape de collecte de données, puisque le chercheur et le didacticien seront en mesure de dissocier ce qui est de l’ordre de leur champ d'observation (la langue-culture) de ce qui est hors de leur champ et qui repose sur des compétences professionnelles strictes (la bonne réalisation du travail et le respect des normes, par exemple). Le chercheur, puis le didacticien[9], devront identifier et dissocier ce qui relève purement du domaine professionnel de ce qui relève de la didactique, à savoir la langue-culture à enseigner. Cette étape permettra également de neutraliser le sentiment de légitimité, car la situation d'observation ou d'entretien asymétrique sera admise et ne sera pas perçue comme un frein mais comme un levier. Acculturés, ils disposeront de "points de contacts" pour questionner les acteurs et adopter une démarche socratique. Enfin, en s'appuyant sur les référentiels métier (Mangiante, 2020, Royer, 2019), l'observateur dispose d'un canevas opérationnel, attesté par la branche ou le domaine, pour identifier les consignes, lui offrant un “guide” méthodologique comparable aux grilles d’entretiens pour pénétrer et structurer sa collecte.

 

Bibliographie

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[1] Nous adoptons une démarche méthodologique reposant sur l’analyse de discours et les différentes étapes constitutives de la production à la réception au cours de l’interaction, comme des lieux privilégiés d’analyse ou d’émergence de phénomène à analyser.

[2] A ce stade de la réflexion, nous admettons comme « objets concrets de communications » tout élément discursif (oral et/ou écrit) ou toute action ou absence de discours ou action. L’objet concret de communication identifié ici est celui qui annonce, prescrit, déclenche, programme ou interrompt une tâche professionnelle. [3] //www.ufsbd.fr/wp-content/uploads/2013/11/Recos-espace-PRO.pdf , consulté le 10 avril 2020. [4] https://www.sfpio.com/images/Articles/PG1604_041-fich_protocole-test_and_drive_sfpio_finale_2016_.pdf ,consulté le 10 avril 2020.

[5] Dans le cadre de la démarche méthodologique appliquée dans cette étude, nous proposons au chercheur d’adopter une posture d’observateur au cours de situations d’observation in situ, sans interaction avec le public observé durant la réalisation de la tâche. L’interaction intervient à l’issu de l’observation lors de temps d’échanges avec les populations observées.

[6] Le chercheur observateur est défini par sa compétence à « savoir comprendre l’objectif de l’action, être en mesure [potentiellement] de réaliser l’action, mais jamais en situation de productivité de l’action ». (Medina, 2014 : 164)

[7] Dans cette transcription nous utilisons les conventions suivantes : « XX » mentionne l’anonymisation des interlocuteurs, les mots ou collocations encadrés par « # » signalent la substitution d’un nom par sa valeur sémantique et les silences compris entre 3 et 10 secondes sont mentionnés au moyen de la codification suivante (…).

[8] Dans cet extrait la convention de transcription est la suivante : « I » mentionne un interlocuteur et les éléments en italique et entre parenthèses signalent un commentaire de l’observateur.

[9] Nous admettons ici le fait que la posture adoptée dans cet article, à savoir le « chercheur-didacticien » puisse être transposée au sein d’une équipe entre le chercheur qui mène l’analyse et le didacticien qui construira la formation. Cette situation impliquera une médiation entre les acteurs et un transfert de connaissances.

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